Le Conseil exécutif de l’Unesco a adopté il y a un mois une décision portant sur la "Palestine occupée". Dans le cadre de ses prérogatives, l’Unesco avait pour objectif de "sauvegarder le patrimoine culturel palestinien et le caractère distinctif de Jérusalem-Est."
Si cette résolution paraît intéressante de prime abord, elle a subi une déferlante médiatique venant des plus hauts dirigeants israéliens au Premier ministre français en passant par des sites traditionnellement pro-sionistes.
Deux critiques lui sont formulées, d’abord sur la judaïsation de Jérusalem (1) puis sur l’emploi de l’expression "puissance occupante" (2).
1. La politique de judaïsation de Jérusalem est un fait avéré
L’Etat d’Israël a réalisé ces dernières années des travaux et mis en place des projets visant à s’approprier une partie de Jérusalem-Est. . L’affaire n’est globalement pas nouvelle. Sur place, ce qui se joue, c’est une guerre de légitimité. Les uns légitimant leur politique par des traces prétendues d’un passé juif et les autres défendant le quelques hectares restant en arguant l’existence d’habitations et de tombes anciennes.
Dans ce conflit, les tombes sont l’une des seules preuve valable de l’existence de l’une des communautés. C’est ainsi, par exemple, que le tombeau de Joseph fut incendié partiellement l’an dernier par des émeutiers palestiniens de Naplouse en Cisjordanie. Alors que le président palestinien avait condamné cet acte qualifié "d’irresponsable", la police israélienne était alors intervenue au coeur de la Cisjordanie libre et des heurts avaient provoqué la mort de deux manifestants.
Dans le même temps, Israël en est venu à théoriser sa politique de colonisation de Jérusalem-Est autour de deux grands principes : l’expulsion des palestiniens de la ville sainte et la construction d’espaces pour renforcer l’idée d’appartenance à une identité juive.
L’expulsion des palestiniens n’a jamais cessé depuis l’installation des premières colonies dans la région. En 2009, Courrier international rappelait d’ailleurs que "les autorités israéliennes [accéléraient] la politique d’expulsion des Palestiniens". Sous la pression de l’extrême-droite représentée en premier lieu par Ateret Cohanim, cette politique n’a cessé de s’intensifier ces dernières années. Ces faits sont corroborés par de nombreux rapports et de nombreux journalistes tel Julie Schneider pour Slate.fr qui s’est déplacée directement sur les lieux en question en 2009. Les mêmes faits étaient dans le même temps relayés par l’Express et France Culture.
La judaïsation de Jérusalem-Est est le deuxième axe de cette politique volontairement sioniste. En 2010 par exemple, Laurent Zecchini du Monde rappelait que le Musée de la tolérance israélien avait été érigé sur un ancien cimetière musulman vieux de 9 siècles. L’entretien des tombes étant prohibé pour les familles palestiniennes, le gouvernement israélien d’alors ne s’en occupait pas et justifia à l’époque la construction de ce musée. La démarche de certaines associations pour protéger les lieux avait même été soutenu par de nombreuses organisation de défense des droits de l’homme, palestiniennes et même israéliennes (tant c’est vous dire que le scandale fut assumé par le pouvoir), les voies de recours furent épuisées et le centre finalement construit.
2. Israël, "la Puissance occupante"
Tout cela pour en venir à défendre cette expression nouvelle, qui dans le vocabulaire onusien est un véritable inédit.
Le seul précédent est historique, il s’agit de l’Assemblée générale du 18 juin 2014 où un représentant israélien avait été nommé à la Commission décolonisation. Face à cette nomination regrettée par les pays arabes, l’émir du Qatar avait alors parlé d’Israël comme d’une "puissance occupante élue à la vice-présidente d’une Commission chargée des droits du peuple palestinien et des territoires occupés".
Mais depuis, de l’eau a coulé sous les ponts et cette expression est aujourd’hui assumée. Cette nouveauté notable du champ lexical est malheureusement une réalité que nul ne saurait contester à moins d’être parfaitement aveugle.
Au fond, comment définir une zone occupée ? Le droit international est très clair à ce sujet, il suffit d’ouvrir n’importe quel manuel et de consulter les textes en lien avec Règlement de la Haye et la Quatrième Convention de Genève.
"Un territoire est considéré comme occupé lorsqu’il se trouve place de fait sous l’autorité de l’armée ennemie. L’occupation ne s’étend qu’aux territoires où cette autorité est établie et en mesure de l’exercer".
L’article 42 de la Convention IV
En entrant dans les détails, il faut consulter l’article 43 et 44 de la même Convention, reprendre le Règlement de la Haye qui établi un certain nombre de conditions plus strictes relatives au contrôle des frontières (qui est avéré pour Gaza), le droit que se réserve l’Etat à intervenir militairement dans la zone occupée (ceci n’est pas nouveau, chaque semaine apportant son lot d’actualité probante).
Par conséquent, il ne faut pas sortir d’une grande école ou être pro-palestinien pour comprendre qu’il y a bien occupation et que celle-ci est prouvée par les trop nombreux éléments qu’on nous rapporte depuis plusieurs décennies. Tant que le contrôle est "véritable", le droit international reconnaît l’occupation.
Par conséquent, les critiques à l’encontre de cette résolution sont infondées
C’est un fait historique, assumé, reconnu de tous : Israël est une puissance occupante, l’Etat Israélien ne reconnaît en rien le droit international lorsqu’il lui indique de cesser ses manoeuvres de colonisation, et gare à ceux qui évoqueraient la notion de "Puissance occupante", le Premier Ministre de la France jouant le mirador d’une bien-pensance nauséabonde. Avec lui, il y a les Cazeneuve, Ayrault, Hollande, Goasguen et autres Habib qu’on aimerait plus entendre nous parler de la réalité plutôt que des fantasmes de l’occupant.
Il aura suffit d’une lettre de Netanyahu pour que la politique française se dresse au garde à vous et qu’elle rentre dans le rang, c’est honteux.
Question au gouvernement de Meyer Habib, député des français de l’étranger à Manuel Valls qui déplorait "le vote d’une résolution ayant suscité des interrogations voire des inquiétudes". "Il y a dans le texte de l’UNESCO des formulations malheureuse, maladroites, et qui auraient du être incontestablement évitées comme ce vote"dit-il à partir de 3’35.
Si l’on souhaite réellement la paix, arrêtons de nous mentir. La réalité est que la plupart des individus aujourd’hui au pouvoir à Gaza et en Israël ne souhaitent pas cette paix, laissant Mahmoud Abbas et ses tentatives de réconciliation au centre.
Les israéliens ont une part de responsabilité, ils ont voté pour un Premier Ministre et une majorité qui mènent une politique inacceptable, indigne et ignoble. Alors arrêtons par pitié de se cacher derrière son petit doigt en parlant de l’islamisme ou de quelque référence que ce soit pour éviter de parler du fond.
Il y a occupation, elle doit cesser, et c’est non négociable.
L’Etat palestinien doit exister, et c’est non négociable.
Cette résolution est bonne, elle repose sur des faits avérés, prouvés par des photos, des rapports. Qu’un Etat mis en cause parle de mensonge ou de bêtises ne paraît pas absurde : il faut bien nier pour continuer l’occupation. Mais nous n’avons pas à prendre pour argent comptant les propos des Premiers Ministres concernés. Cette question porte sur le patrimoine de la ville sainte, c’est une question fondamentale au regard de l’Histoire car elle rappelle la place proéminente des arabes en Palestine, un élément clé pour comprendre les manoeuvres colonisatrices d’Israël qui ne peut malheureusement pas cacher ses manoeuvres tant elles sont grossières, et l’un des seul moyen pour préparer l’avenir des palestiniens et de leur permettre un jour, un retour sur leurs terres.
Enfin, contrairement à ce qu’insinuent de nombreux site, elle ne remet pas en cause le patrimoine juif de Jérusalem, elle ne fait que l’estimer à sa juste valeur et ce qui est déjà amplement suffisant ! Pourquoi faut-il que l’hubrys pousse les hommes à s’inventer une histoire et des tombes ?
Aux journalistes de prendre le relais, les politiques fermant les yeux sur la colonisation
C’est aux journalistes de faire un travail de vérification, il faut donc que ce traitement médiatique s’intensifie. Car après avoir arrêté de financer l’organisation des Nations Unies après qu’elle eut reconnue l’Etat Palestinien, Israël refuse aujourd’hui la nomination d’un représentant permanent de l’Unesco pour Jérusalem-Est.
Enfin, on ne peut que s’offusquer des propos tenus par l’actuel grand rabbin de France qui n’a aucune légitimité à parler de sujets politiques et qui participe d’un amalgame bien utile à l’extrême-droite en défendant avec vigueur une politique sioniste tout en étant rabbin.
Vous imaginez un imam convoquer le Premier Ministre pour lui faire des remontrances à l’égard d’un communiqué qui mettrait en cause Daesh détruisant Palmyre ? Non, vraiment, on croirait rêver.