« Un nouveau cadre » dans la relation. C’est ainsi que l’opérateur Orange a qualifié, dans un communiqué publié mardi 30 juin, l’accord officialisé avec son partenaire israélien, Partner. Ce « nouveau cadre » crée surtout les conditions d’un divorce dans les deux ans, quelques semaines après la tempête médiatique et politique provoquée par Stéphane Richard, le patron d’Orange, qui envisageait l’hypothèse d’un retrait du groupe d’Israël. « Le contrat accorde à Partner et à Orange le droit de résilier l’accord de licence de marque Orange actuellement en vigueur », précise le communiqué.
Selon l’accord, Partner peut exercer son droit de résiliation dans un délai de douze mois. Au cours de l’année qui suivra, les deux compagnies pourront user de cette option. « Nous avons discuté ces dernières semaines, après tout ce qui s’était passé, et nous avons essayé de voir ce qui était le mieux pour les deux sociétés, explique-t-on à Partner. Ca ne veut pas dire nécessairement qu’il y aura un divorce au bout. »
Avec quelles conditions financières ?
Le but était pourtant de définir les conditions financières de cette rupture. L’accord prévoit le versement d’un montant maximum de 90 millions d’euros à Partner en cas de résiliation au cours de cette période. Orange aidera Partner à réaliser une étude de marché, à hauteur de 40 millions d’euros, puis assumera le coût (50 millions d’euros) que représenterait un changement de marque pour l’opérateur israélien, si une résiliation intervenait.
Cette remise à plat était indispensable. Stéphane Richard, le patron d’Orange, avait suscité une forte polémique au cours de son passage au Caire, le 3 juin. Il avait alors déclaré que si Orange avait la possibilité de rompre avec l’opérateur Partner, sans s’exposer à des pénalités, la société française le ferait dès « demain » et se retirerait du pays.
Ces mots avaient été interprétés en Israël comme une volonté de boycottage de l’Etat hébreu. Ils semblaient donner des gages au collectif d’organisations non gouvernementales et de syndicats, en France, qui avaient signé un rapport intitulé « Les liaisons dangereuses d’Orange dans le Territoire palestinien occupé ». Le document dénonçait les bénéfices que tirait Orange de ses activités dans les colonies israéliennes, via Partner.
Orange « ne soutiendra jamais le boycott contre Israël »
Devant les réactions outragées en Israël, l’Etat français, actionnaire d’Orange, a dû publiquement confirmer son opposition à tout mouvement de boycottage. Stéphane Richard s’est rendu à Jérusalem pour s’expliquer directement avec le premier ministre, Benyamin Nétanyahou. Le patron d’Orange a assuré que sa société « n’a jamais soutenu et ne soutiendra jamais toute forme de boycott contre Israël. Nous sommes dans les affaires, nous faisons de la communication, nous sommes ici pour connecter les gens ». L’opérateur avait même l’intention, a dit M. Richard, de « continuer à développer » ses activités dans le pays, sans plus de précision.
La question du mouvement BDS (Boycott désinvestissement sanctions), qui vise à pénaliser Israël en raison de la poursuite de l’occupation, traverse l’Union européenne. L’étiquetage des produits fabriqués dans les colonies a été réclamé par 15 ministres des affaires étrangères de l’UE. Aux Etats-Unis aussi, le débat est posé, même si le Congrès est très largement hostile à toute action contre Israël.
Mais l’administration Obama a publiquement exprimé son opposition, mardi, à un amendement bi-partisan à la nouvelle législation sur le commerce (Trade Promotion Authority bill). Il prévoyait de transmettre comme instruction aux négociateurs américains, dans le domaine des échanges commerciaux, de s’opposer à toute action relevant du mouvement BDS qui frapperait l’Etat hébreu en raison de ses activités « dans les territoires contrôlés par Israël ». Cette formulation semblait implicitement légitimer l’occupation de la Cisjordanie.
Le porte-parole du département d’Etat, John Kirby, a expliqué mardi que l’amendement allait à l’encontre de la position de Washington sur les colonies depuis des décennies. « Chaque administration américaine depuis 1967, démocrate ou républicaine, s’est opposée au développement des colonies israéliennes au-delà des lignes de 1967, a-t-il rappelé. Cette administration n’est pas différente. Le gouvernement américain n’a jamais défendu ni soutenu les colonies israéliennes et les activités qui y sont liées et, par extension, ne soutient pas les politiques ou les activités qui les légitimeraient. »