.. par des blocs de béton de huit mètres de haut au pied desquels un nouveau point de passage vient de remplacer l’ancien, vétuste.
Ce dernier est constitué d’un réseau de couloirs, grilles ou tourniquets électriques avec sas de sécurité, commandé à distance par des soldats israéliens assis derrière les vitres de leurs guichets.
Les touristes et les pèlerins, qui sont les plus nombreux à utiliser ce nouveau passage, se disent choqués à la fois par le mur et par les conditions dans lesquels ils doivent transiter. Si les bus de touristes se font plus nombreux près de l’église de la Nativité, les pèlerins restent rarement plus d’une journée sur place. Pas de quoi donc relancer l’économie complètement sinistrée de cette ville qui vit essentiellement du tourisme. Le maire de Bethléem dénonce la transformation de sa ville en une « prison à ciel ouvert », à l’instar des autres localités palestiniennes.
Plus au nord, le check-point de Qalandia, qui coupe la route entre Jérusalem et Ramallah, vient lui aussi d’être complètement rénové : sept files d’attente ont été prévues pour les piétons et quatre voies pour les véhicules. Selon l’armée israélienne, quelque 18 000 personnes en moyenne le traversent chaque jour comme Faten, Hiérosolymitaine (Jérusalémite) et étudiante à l’université de Bir Zeit, au nord de Ramallah. « C’est une occupation high-tech », ironise cette dernière. Les autorités israéliennes de leur côté vantent les mérites du nouveau système en affirmant qu’il « facilitera » et « rendra plus humain » le transit des personnes, lorsque celles-ci sont munies du précieux permis militaire pour circuler.
Ce check-point offre à lui seul un échantillon de la situation globale dans laquelle se retrouvent les Palestiniens. Le lieu est en effet devenu un carrefour des blocs de béton de huit mètres de haut qui sillonnent désormais la Cisjordanie. Un tronçon de ce mur arrive au pied des premières boutiques du camp de réfugiés de Qalandia. De l’autre côté, en décalé, un autre tronçon domine le nouveau check-point. En face, un troisième tronçon coupe dans le sens de la longueur la route principale entre Jérusalem et Ramallah.
La colonie proche de Kochav Yaakov semble, comme le mur, se rapprocher chaque jour un peu plus de l’espace dans lequel sont désormais comprimés les Palestiniens du camp. Pour ces derniers, le paysage comme l’avenir est de plus en plus gris, couleur du béton, que seuls viennent égayer les slogans et les dessins contre le mur, déclaré illégal par la Cour internationale de justice, mais dont la construction se poursuit à un rythme effréné. La partie occupée de Jérusalem est quant à elle chaque jour un peu plus isolée du reste de la Cisjordanie. Ces nouveaux check-points, également en construction notamment au sud de Naplouse, se donnent l’allure de « postes frontaliers » à l’intérieur même de la Cisjordanie divisée désormais en trois grosses zones, au nord au centre et au sud, isolées les unes des autres.
Un nouveau réseau routier pour les Palestiniens est en train d’y être mis en place, parallèlement à celui dont bénéficient les colons israéliens. Une sorte de « carte routière alternative » que les Palestiniens devront suivre en faisant parfois d’énormes détours défiant toute logique : aller au nord pour rejoindre une destination au sud sur de mauvaises routes ou en passant l’un des quelque 25 tunnels en construction, et sans jamais être assuré de parvenir à destination.
- Check-point de Beit Furik, près de Naplouse, le 22 12 2005
Le projet fait penser à ces fameux labyrinthes ou l’on place à son début une souris et, à l’autre bout, un morceau de gruyère, avec, entre eux deux, des impasses et des sens interdits. Les Palestiniens parlent eux « d’une toile d’araignée » dans laquelle « ils sont piégés » : " Une fois le tout terminé, Israël pourra se passer de la plupart de ses effectifs militaires pour nous contrôler", explique Jamal Jumaa, coordinateur du comité palestinien de la campagne contre le mur. "Et je suppose qu’une cinquantaine de Jeeps suffiront à surveiller l’ensemble de la Cisjordanie. Il suffira de bloquer la route menant à un village ou à un groupe de villages pour pouvoir imposer des couvre-feux, s’emparer de terres ou bombarder, laissant les populations seules et impuissantes à l’intérieur de leurs ghettos. "
Une situation qui, de l’avis de nombreux spécialistes, ne pourra déboucher que sur une recrudescence de la résistance armée dans une logique déjà éprouvée dans la bande de Gaza.