Face à l’escalade récente de la violence à Jérusalem-Est, suite notamment à l’installation par Israël de portiques de sécurité à l’entrée de l’esplanade des Mosquées, M. Nickolay Mladenov, le Coordonnateur spécial des Nations Unies pour le processus de paix au Moyen-Orient, a appelé, aujourd’hui, à respecter le statu quo de 1967 sur les lieux saints de la vieille ville, pour éviter que le conflit israélo-palestinien ne dégénère en « guerre de religion » dans l’ensemble de la région.
À l’occasion du débat public trimestriel du Conseil de sécurité sur la situation au Moyen-Orient, auquel ont participé une cinquantaine de délégations, M. Mladenov a résumé les événements survenus ces 11 derniers jours à Jérusalem-Est, depuis l’assassinat, le 14 juillet, de policiers israéliens à l’entrée de l’esplanade des mosquées, qui a amené Israël à fermer le site pour la première fois depuis 1969, avant de le rouvrir deux jours plus tard après avoir installé sans concertation des portiques de détections de métaux à l’entrée. Après des heurts sanglants, Israël a retiré les portiques le 24 juillet.
Tout en souhaitant que ce retrait contribue à dissiper la crise au cours des prochains jours, M. Mladenov a lancé un appel au calme, jugeant « vital de maintenir le statu quo concernant les lieux saints de Jérusalem-Est, établi depuis 1967 », afin d’éviter les risques d’escalade et la transformation du conflit israélo-palestinien en « guerre de religion ». Le Coordonnateur spécial s’est toutefois dit préoccupé par « certaines factions » qui continuent à l’heure actuelle de « jeter de l’huile sur le feu » et les a appelées à mettre fin à toute provocation.
La situation fragile à « Jérusalem-Est occupée » s’est enflammée parce qu’Israël, Puissance occupante, poursuit « son ordre du jour destructeur » contre le peuple palestinien et « nos sites sacrés », a accusé l’observateur de l’État de Palestine. Pour lui, « les comportements agressifs et violations provocantes du statu quo historique » dans la vieille ville ne servent qu’à exacerber les sensibilités religieuses. « Nous n’accepterons jamais ces restrictions », a-t-il averti.
Les Palestiniens ne cherchent, avec cette affaire, qu’à « détourner l’attention de la vérité », a pour sa part affirmé le représentant d’Israël, pour qui il n’y a « rien de plus faux » que de prétendre que son pays cherche à modifier le statu quo à Jérusalem-Est. Bien au contraire, la priorité d’Israël était d’assurer la sécurité des fidèles et des visiteurs sur le site, a-t-il expliqué, avant d’accuser l’Autorité palestinienne de s’attacher à « financer, promouvoir et glorifier la terreur », en consacrant 7% de son budget à financer les terroristes et leur famille. Le représentant d’Israël s’en est ensuite pris à la communauté internationale, accusée d’autoriser que près de 30% de son aide aux Palestiniens serve à « parrainer l’argent du sang ».
« Le Conseil de sécurité est en effet obsédé par Israël et refuse de reconnaître qui est à l’origine des meurtres dans la région », à savoir « le Hezbollah », a affirmé la représentante des États-Unis. Se refusant à commenter la situation actuelle à Jérusalem-Est, elle s’en est prise à cette « organisation terroriste dédiée à la destruction d’Israël » et a déploré l’absence de contrôle du Gouvernement libanais sur ce groupe qui sape son autorité.
Mais pour la représentante du Liban, le problème de son pays tient surtout au fait qu’il ne se passe pas un jour sans qu’Israël ne bafoue la souveraineté libanaise en mer et sur terre. Quant à la région, c’est plutôt l’occupation continue des territoires palestiniens qui la déstabilise, a déclaré le représentant de l’Égypte. Tout en saluant les efforts du Roi Abdallah II de Jordanie, dont le pays est le gardien de l’esplanade des Mosquées, pour désamorcer la crise actuelle, ce dernier a appelé le Conseil à prendre conscience que, si la situation ne revenait pas à la normale sur le site, toute la région risquait de s’embraser.
Pour éviter un tel embrasement, la représentante de la Jordanie a appelé à mettre en place des mesures d’urgence. Israël doit permettre l’accès sans aucune restriction des fidèles à l’esplanade des Mosquées et cesser de tenter d’imposer un nouveau statu quo sur le terrain. Quant à la communauté internationale et au Conseil, ils doivent prendre leurs responsabilités en obligeant Israël à respecter ses obligations juridiques.
La représentante a également appelé à organiser une réunion d’urgence des pays arabes pour relancer la solution des deux États. Les événements des dernières années en Iraq, en Syrie ou plus récemment au Yémen au Moyen-Orient ne doivent pas faire oublier que « l’essence de la violence et de l’instabilité » au Moyen-Orient a trait à la question palestinienne, a-t-elle insisté, rejointe par plusieurs autres intervenants qui ont, à l’exemple du Pérou, demandé que la communauté internationale affronte le conflit israélo-palestinien « avec un sentiment renouvelé d’urgence ».
Par ailleurs, de nombreuses délégations ont déploré la situation humanitaire désastreuse à Gaza, où la crise qui affecte près de deux millions de Palestiniens s’est « brutalement aggravée », selon le représentant de la France, en raison du blocage de la fourniture en électricité qui dure depuis plus de trois mois. Dans ce contexte, le Coordonnateur spécial a appelé à accélérer le mécanisme de reconstruction de Gaza.
Mais il faudrait pour cela que prenne fin l’impasse politique entre le Fatah, en Cisjordanie, et le Hamas, que M. Mladenov a accusé d’avoir « pris possession de Gaza par la force » et sur laquelle il n’a depuis lors eu de cesse de renforcer son contrôle. Aujourd’hui, a-t-il déploré, « la bande de Gaza et la Cisjordanie sont plus éloignées que jamais ». Le Coordonnateur spécial a donc appelé les dirigeants palestiniens à s’unir, ce qui suppose à ses yeux que l’Autorité palestinienne prenne des mesures en faveur de la formation d’un Gouvernement d’unité nationale, et que le Hamas mette fin aux provocations contre Israël et garantisse la sécurité à la frontière avec l’Égypte. Cela supposerait aussi qu’Israël mette fin au blocus de Gaza, comme le lui ont demandé de très nombreuses délégations.