Israël a assiégé Gaza depuis que le Hamas a remporté les
élections palestiniennes et a renforcé l’état de siège après que des
Palestiniens aient capturé un soldat israélien près de Rafah, fin juin
2006. Depuis, nous avons eu très peu d’électricité, de carburant,
d’argent, de nourriture ou de médicaments.
Toutefois, nous avons ressenti un peu d’espoir, la semaine dernière,
lorsque des Palestiniens ont fait tomber le mur qu’Israël a construit le
long de la frontière de Rafah avec l’Egypte, ce qui nous a permis
d’échapper à la prison et d’aller en Egypte pour acheter des produits de
première nécessité.
L’armée israélienne a détruit environ 2000 maisons à Rafah au cours des
sept dernières années. En janvier 2004, ils ont détruit notre maison. Ma
grand-mère, ma tante, mes oncles et mes cousins vivaient dans notre maison parce que leurs maisons venaient d’être démolies. Ensuite, un bulldozer israélien a commencé la destruction de notre maison. J’ai aidé ma grand-mère parce qu’elle a de la difficulté à marcher. Ma mère s’est
évanouie, alors je l’ai traînée dans un lieu plus sûr. Ce jour-là, des
bulldozers israéliens ont détruit 50 maisons dans notre quartier.
Lorsque le siège s’est intensifié fin juin 2006, ma famille et moi avons
été piégées pendant 14 jours au point de passage de Rafah avec 4000
habitants de Gaza qui revenaient d’Egypte, car Israël avait fermé la
frontière. Nous n’avions que peu de nourriture ou d’eau. Neuf personnes
sont mortes. Finalement, des hommes armés de la Bande de Gaza ont cassé lemur-frontière, ce qui nous a permis de rentrer chez nous.
Mais ces derniers mois ont été les plus difficiles, avec des frontières
fermées, une croissance de la pauvreté, la diminution des livraisons de
vivres, de médicaments et autres produits et des parties de Gaza sans
électricité en raison du manque de carburant. L’armée israélienne tue des
civils et des combattants palestiniens presque quotidiennement.
Nous attendons notre destin. Une mort lente ou rapide, c’est le même
résultat. La semaine dernière, Huda de Rafah, 8 ans, m’a dit : « J’ai des
problèmes rénaux et je dois aller à l’hôpital trois fois par semaine, et
maintenant que les Israéliens menacent de couper l’électricité, cela veut
dire que je vais mourir ».
A de nombreuses reprises, je me suis dit que je devais être plus
courageuse. J’ai stoppé toutes les voix qui me disaient que je ne pouvais
pas écrire, que les gens ne me comprendraient pas, j’ai arrêté toutes les
peurs qui me disaient que les choses ne changeront jamais, parce qu’il y a toujours des façons de vivre et de changer. Mon peuple a beaucoup de
courage, mais ce qui se passe, c’est très dur.
Je ne suis plus la même personne qu’avant ces expériences. Quand les
Israéliens tuent des innocents, ils changent les enfants de ceux qui ont
été tués en des personnes différentes. Il n’est pas difficile de deviner
si ces enfants deviendront des enfants gentils ou des enfants tristes
prêts à se venger.
Pourtant, quand je regarde nos enfants, j’ai en quelque sorte le sentiment que tout changera pour des jours meilleurs. Chacun de nous peut changer un peu les choses et faire briller le soleil, même dans une boîte sombre, comme à Gaza.
Le 23 janvier à 3h du matin a été un moment de la victoire. Le mur de
Rafah sur la frontière avec l’Égypte avait disparu. Je pouvais attendre,
je voulais aller voir ça. Je voulais voir le sourire sur les visages de
tous les Palestiniens, ce qui n’était pas arrivé depuis longtemps.
Oui, mes enfants, maintenant vous pouvez voir l’Égypte. Le mur a disparu
et un jour tous les murs auront disparu.
Amal, 9 ans, et Yasmine, 11 ans, m’ont dit : "Rappelez-vous quand on vous avait dit que c’était notre rêve de voir les enfants égyptiens, jouer avec eux et voir l’Egypte ? Nous sommes allés là-bas et nous avons acheté des bonbons et des frites, mais nous n’avons pas vu les enfants. "
Mohammed, 22 ans, de Rafah, a expliqué : « Peu importe qui a détruit le
Mur, le Hamas ou le Fatah. C’était des restes laissés par l’armée
israélienne. J’espère que le passage sera ouvert à la circulation de façon
légale, et pas comme ça ».
Lorsque je suis allé aux États-Unis en 2006, les gens m’ont demandé
pourquoi les Palestiniens avaient voté pour le Hamas. Certains dans
l’Autorité Palestinienne étaient corrompus. Ils ont perdu la confiance des
gens. Le gouvernement américain a envoyé des observateurs pour surveiller nos élections et a accepté la participation du Hamas. Le Hamas a remporté les élections de façon démocratique.
Depuis des années, le Hamas construit des infrastructures sociales et
améliore la vie quotidienne des gens. Le Hamas aurait dû avoir une chance.
Au lieu de cela, le monde nous a punis.
Je crois que si les gens ordinaires aux États-Unis et en Europe savaient
ce qui se passe pour les Palestiniens ordinaires, ils auraient beaucoup
plus de compassion. Nous avons besoin de nourriture, d’eau, de maisons, de travail et d’accès au reste du monde. Nous avons besoin de justice.
Et quand les Palestiniens ordinaires auront la justice, il y aura la paix.