À l’heure où de nouvelles élections législatives vont avoir lieu en
Israël, ce 28 mars, Amnesty International demande à tous les partis
politiques israéliens et à leurs candidats d’accorder la priorité aux
droits humains dans leur programme, et de proposer des stratégies et
des plans d’actions bien définis, pour que les droits humains
deviennent une réalité dans toute la société israélienne.
Amnesty International demande aux candidats de proposer des mesures
concrètes pour répondre à des questions essentielles et non résolues
depuis longtemps, notamment :
L’amélioration de l’accès aux droits économiques, sociaux et
culturels en particulier le droit au travail, à la santé et à
l’éducation, ainsi qu’à un niveau de vie suffisant ; pour
les
populations les plus marginalisées d’Israël, notamment les Arabes
israéliens et les migrants, qui continuent à souffrir de politiques et
pratiques discriminatoires. En tant qu’Etat partie au Pacte
international relatif aux droits sociaux, économiques et culturels, et
à la Convention sur les travailleurs migrants de l’Organisation
mondiale du travail, Israël s’est engagé à promouvoir et protéger les
droits reconnus dans ces traités importants ; les candidats doivent
s’assurer que leur politique économique prend ces droits en
considération.
L’intensification des efforts pour lutter contre toutes les formes
de violences envers les femmes ; y compris la violence familiale, le
trafic, l’exploitation sexuelle et ’esclavage pour dette
notamment
en renforçant les mécanismes de protection des victimes, et en
traduisant les responsables de ces violences en justice. Des
progrès importants ont été accomplis ces dernières années dans le
domaine du droit des femmes, tant en droit qu’en pratique, mais il faut
accentuer les efforts pour éradiquer l’inégalité, la discrimination et
les violences frappant les femmes, notamment celles issues des
populations défavorisées.
Le renforcement de la protection des droits humains et des
mécanismes de surveillance, afin de mieux obliger les responsables de
violences à rendre des comptes. Trop souvent, les atteintes aux
droits humains ne font pas l’objet d’enquêtes satisfaisantes et
restent
impunies ; les victimes n’obtiennent ni justice ni réparations. Les
candidats aux élections doivent soutenir l’appel des organisations
israéliennes de défense des droits humains pour l’établissement
d’une
commission nationale des droits humains, ou une institution similaire.
Cette institution disposerait entre autres de l’autorité pour mener, de
sa propre initiative, des enquêtes sur des plaintes relatives à des
violations des droits humains ; en outre, cette commission devrait
publier régulièrement ses conclusions. Les candidats doivent aussi
s’engager à faire en sorte que les principes des droits humains et de
l’égalité de tous les citoyens se trouvent au coeur de toute
constitution ou textes constitutionnels israéliens à venir.
En ce qui concerne la situation dans les Territoires occupés, la
spirale de violence qui, lors des cinq dernières années et demie, a
coûté la vie à tant d’Israéliens et de Palestiniens et causé tant de
destructions et de souffrances, rend d’autant plus urgente la recherche
d’une paix juste et durable. Amnesty International estime que seule une
approche fondée sur les droits humains peut apporter la paix et la
sécurité de manière durable, tant aux Israéliens qu’aux Palestiniens.
Les échecs des négociations et accords passés ont montré que, même si
un programme des droits humains ne peut suffire à lui seul, il doit se
trouver au coeur de toute solution.
Amnesty International condamne sans réserves les attentats visant les
civils, et demande régulièrement aux groupes armés palestiniens de
cesser les attentats suicides et autres agressions visant les civils
israéliens. Notre organisation est consciente de la nécessité des
mesures que doit prendre Israël pour protéger ses citoyens des
attentats suicides et autres, mais nous constatons avec inquiétude que,
trop souvent, la politique appliquée par Israël au nom de la sécurité
viole de manière flagrante les droits fondamentaux des Palestiniens
dans les Territoires occupés. Une politique respectueuse des droits
humains améliorera la sécurité, et non l’inverse.
Amnesty International demande à tous les candidats de reconnaître que
le respect des droits humains et du droit international constitue une
obligation fondamentale ; et non une concession ; nous demandons aussi
aux candidats de s’engager en faveur d’une solution juste,
respectant
les droits humains de toutes les parties, notamment en mettant fin à l’expansion continue des colonies israéliennes et à la
construction de la barrière/mur à l’intérieur de
la Cisjordanie occupée, notamment dans les zones de Jérusalem est et
alentours, car ces pratiques constituent une violation du droit
international. Les colonies israéliennes et la barrière/mur en
Cisjordanie sont en infraction avec le droit international et violent
les droits humains fondamentaux de la population palestinienne,
notamment le droit à un niveau de vie correct, au logement, à la santé,
à l’éducation, au travail et à la liberté de mouvement au sein
des Territoires occupés. Le tracé de la barrière/mur a été déterminé
par la présence et l’emplacement des colonies israéliennes, qui sont
illégales.
Le besoin légitime d’Israël d’assurer la sécurité de ces
frontières en
fermant l’accès aux Palestiniens susceptibles de constituer une menace
à sa sécurité ne justifie pas la construction de la barrière/mur à
l’intérieur de la Cisjordanie. Des mesures de sécurité, y compris
la construction de la barrière/mur, auraient pu être prises en
territoire israélien, sur la Ligne verte.
Mettant un terme aux châtiments collectifs visant la population
palestinienne des Territoires occupés. Les limitations strictes
imposées par Israël aux déplacements des Palestiniens à l’intérieur des
Territoires occupés, qui paralysent l’économie palestinienne et
obligent une partie croissante de la population palestinienne à
dépendre de l’aide internationale, constituent une forme de châtiment
collectif. Ces mesures doivent être levées sur-le-champ ; Israël ne
doit pas imposer d’autres châtiments collectifs à la population
palestinienne, en représailles de la victoire du Hamas lors des
récentes élections palestiniennes. Aux termes du droit international,
Israël, en tant que puissance occupante, se voit interdire le recours
aux châtiments collectifs et est responsable du bien-être de la
population occupée. Israël ne s’est pas acquitté de ses obligations
dans ce domaine, laissant la communauté internationale s’occuper de la
population palestinienne. L’implication et l’aide de la
communauté
internationale ne dégagent nullement Israël de ses responsabilités
définies par le droit.
Établissant un mécanisme efficace, indépendant et impartial pour
enquêter sur les homicides illégaux de Palestiniens par les forces
israéliennes, et sur les agressions visant les Palestiniens et leurs
biens, perpétrées par des colons israéliens, afin de traduire leurs
responsables en justice. De manière générale, il existe peu
d’enquêtes ou d’enquêtes efficaces sur les homicides illégaux et
le
recours excessif à la force ayant entraîné la mort ou des blessures du
fait des forces de sécurité israéliennes ; ni sur les fréquentes
agressions visant les Palestiniens et leurs biens, perpétrées par les
colons israéliens en différents endroits de la Cisjordanie. Les
responsables de ces violences sont rarement traduits en justice et,
dans les cas exceptionnels où des militaires ou des colons ont été
condamnés, les peines prononcées ne semblent pas proportionnées à la
gravité des actes commis. Cette impunité généralisée a finalement
encouragé la prolifération des violences. Il faut impérativement
prendre des mesures pour inverser cette tendance et faire en sorte que
les allégations d’homicides illégaux et autres violences fassent
l’objet d’une enquête prompte, indépendante et impartiale, et que
les
responsables rendent des comptes.
En conclusion, Amnesty International demande aux candidats de s’engager
à travailler résolument pour améliorer la protection des droits humains
fondamentaux dans leur programme, et, s’ils sont élus, de mettre en
oeuvre les recommandations ci-dessus.
Avec mes sincères salutations,
Irene Khan,
Secrétaire générale.