Monsieur le Premier secrétaire,
Je dois vous faire part de mon indignation devant l’adoption le 16 février au Conseil de Paris de deux vœux condamnant la campagne internationale BDS, l’un à l’initiative du groupe PS, l’autre à l’initiative du groupe LR avec l’abstention bienveillante des élus socialistes.
Ce vote indigne constitue une atteinte grave à la liberté d’expression, à la liberté d’apporter son soutien à un peuple opprimé et privé de ses droits nationaux. Récusant toute mise en cause de la politique de l’Etat d’Israël malgré ses violations continues du droit international et du droit humanitaire, il va jusqu’à endosser les attaques calomniatrices contre une réunion publique de l’AFPS à la mairie du 14ème sur « le désastre écologique de l’occupation israélienne en Palestine et la question de l’eau » avec la participation d’un député européen et celles, tout aussi choquantes, contre l’exposition « In between Wars » organisée par Médecins sans Frontières à la Maison des métallos.
A l’heure où le gouvernement Netanyahou mobilise des moyens sans précédent pour tenter de contrer l’impact de la campagne internationale anti-raciste et non-violente BDS, ce vote révèle de façon honteuse la capacité d’influence et de nuisance du lobby des inconditionnels d’Israël.
Capacité de nuisance, car le vote de Paris, ville symbole s’il en est, contribue à coup sûr à affaiblir et décrédibiliser la diplomatie française. Celle-ci même qui est régulièrement malmenée par un Nétanyahou qui a bien vu dans les deux vœux du Conseil de Paris un motif d’encouragement à sa politique de fuite en avant.
Capacité de nuisance encore, car en laissant un lobby communautaire influencer de la sorte la politique française, non seulement dans ses relations avec l’Etat d’Israël mais aussi sur le plan fondamental des libertés publiques, c’est la cohésion de la société française et son pacte républicain que vous mettez ainsi en danger.
Vous êtes, Monsieur Cambadélis, le premier responsable du Parti socialiste au nom duquel Madame Anne Hidalgo et ses amis ont agi.
Nous pensions jusqu’à présent que votre parti était en accord avec les positions prises par le Conseil de l’internationale socialiste les 6 et 7 juillet dernier à New York qui précisait : « Le temps est venu pour la communauté internationale (de manière collective) de s’acquitter de sa responsabilité en vertu du droit internationale de mettre fin à l’occupation et à tous les obstacles empêchant le peuple palestinien d’exercer son droit à l’autodétermination ».
De même avec les positions prises au sommet du Cap de l’Internationale socialiste du 30 août au 1er septembre 2012 qui disait expressément que « Les produits des colonisations, qui utilisent les terres et ressources palestiniennes, doivent être boycottés. »
http://www.internationalesocialiste.org/viewArticle.cfm?ArticlePageID=1696
Devons-nous penser que le PS français tourne le dos aux positions de l’Internationale socialiste et fait désormais sienne la rhétorique israélienne qui occulte le blocus de Gaza, l’occupation de la Cisjordanie, l’extension des colonies, l’annexion de Jérusalem Est avec son cortège d’expulsions et de démolitions de maisons, les multiples discriminations et entraves à la circulation des Palestiniens sur leur propre territoire ?
Une telle attitude ne peut qu’éloigner toute perspective d’une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens et encourager la fuite en avant des dirigeants israéliens qui menace d’aggraver le chaos régional. Il est de l’intérêt de tous, et en particulier des peuples d’Europe, de s’y opposer sans faiblesse.
Je souhaite pouvoir vous rencontrer rapidement pour voir comment le Parti socialiste, avec tous ceux qui s’expriment en son nom, entend revenir enfin aux principes du droit des peuples et de la solidarité internationale. Dans cette attente, je vous prie de croire, Monsieur le Premier secrétaire, en toute ma considération.
Le Président de l’AFPS
Taoufiq Tahani