Août 2012 : le gouvernement de la République d’Afrique du Sud (RSA) annonce qu’il impose un étiquetage différencié des produits des colonies israéliennes.
Le Danemark déclare mettre en place une mesure identique.
Dès 2009, le Royaume-Uni, avait ouvert la voie de manière plus timide il est vrai, en recommandant aux distributeurs de différencier les produits des colonies des produits israéliens. Recommandation qui fût suivie d’effet, de nombreux distributeurs craignant sinon d’être dénoncés comme complices de la colonisation.
Ces prises de position pour un étiquetage différencié sont importantes à plus d’un titre.
Elles rappellent l’existence des frontières de 1967, seules reconnues par la communauté internationale. Elles s’opposent aux tentatives israéliennes d’effacer cette frontière : les colonies ne sont pas Israël. Et, fait très important, il s’agit de décisions d’autorités publiques.
Pouvoir s’appuyer sur des décisions de l’Etat est extrêmement utile tant pour la sensibilisation et la mobilisation de l’opinion publique que pour obtenir des résultats concrets.
Tous les militants et plus généralement tous les citoyens savent par expérience les nombreuses difficultés et entraves mises par les distributeurs afin de masquer la provenance de ces produits.
Trop contents de pouvoir se cacher derrière l’inaction coupable des pouvoirs publics en France, les directeurs ou centrales d’achats interpellés répondaient qu’ils ne pouvaient toucher à l’étiquetage, que les produits leur arrivaient ainsi, que c’est à l’Etat à faire respecter le droit, qu’ils ne pouvaient suppléer aux manquements de l’Etat etc.
Il est clair qu’une décision gouvernementale met fin à ces « arguments » ou, à tout le moins, les rend difficiles à soutenir par les distributeurs sauf à risquer de se mettre les consommateurs à dos.
Jusqu’à aujourd’hui l’Union Européenne s’est faite complice de la colonisation israélienne. Se contentant de condamnations purement verbales, elle « oubliait » que les produits des colonies sont illégaux. En effet, la colonisation israélienne, le peuplement de ces colonies et le vol des ressources palestiniennes – terre, eau, minéraux - violent le droit international.
Face à l’accélération de la colonisation et à la mort du prétendu « processus de paix », des voix de plus en plus insistantes s’élèvent pour que les gouvernements européens réagissent contre la colonisation par des mesures concrètes pour préserver la possibilité de deux Etats. La politique israélienne conduit à une impasse totale. Tôt ou tard, elle aura des conséquences sur la stabilité et la paix dans cette région stratégique qu’est le Moyen-Orient. C’est ce qu’a exprimé le premier ministre norvégien : « La solution à deux États est en train de s’évanouir et nous sommes aujourd’hui dans une situation extrêmement dangereuse. »
Aujourd’hui les choses bougent. Discuter de mesures concrètes pour faire pression sur Israël n’est plus tabou.
Le premier ministre norvégien tout comme le vice-premier ministre irlandais soulève la question du boycott des produits des colonies. Un officiel grec a confirmé à la presse que les européens discutent du boycott des produits des colonies et d’étiquetage différencié de ces produits.
En réponse au courrier d’un député, Laurent Fabius, Ministre des Affaires Etrangères, indique « Dans le souci d’une meilleure information du consommateur, la France étudie actuellement, en lien avec plusieurs de ses partenaires européens, la possibilité de publier un code de conduite similaire [à ce qui se pratique au Danemark, en RSA], dans le cadre d’une initiative coordonnée. »
Il ne s’agit pas simplement d’instaurer un « code de conduite » facultatif mais de respecter le droit, tout le droit. Il est quand même invraisemblable de devoir rappeler ces évidences : les colonies israéliennes ne sont pas Israël et les consommateurs ont le droit à une information honnête.
Tout en restant vigilants, les entreprises étant très inventives en matière de tromperie sur l’origine comme on l’a vu dans le cas de Sodastream. L’AFPS et Indecosa-CGT ont porté plainte contre la société OPM, importatrice des gazéificateurs Sodastream, libellés trompeusement « Made in Israel » puis « Made in China » entre autres.
Il est important d’insister sur un point : exiger un étiquetage différencié des produits des colonies n’est nullement une manière de « normaliser » ces produits. C’est au contraire un levier contribuant à une dynamique de sanctions. Il suffit de voir les réactions enragées des autorités israéliennes – accusant la RSA de pratiquer l’apartheid - pour mesurer à quel point elles craignent toute mesure étatique. C’est ce qu’a déclaré le porte-parole de la RSA : « Jusqu’à présent, la campagne de boycott a eu un effet économique négligeable, mais la voix d’un gouvernement comme le nôtre pourrait donner un coup de pouce symbolique ».
Un étiquetage clair faciliterait le boycott par les consommateurs qui souhaitent sanctionner la colonisation israélienne.
Tout en exigeant que soit, de toute façon, respecté le droit des consommateurs à ne pas être trompé sur l’origine des produits, l’AFPS demande fermement l’embargo sur les produits des colonies israéliennes, la suspension de l’accord d’association UE-Israël et la rupture de tout lien commercial ou financier avec les colonies israéliennes. La campagne du « Collectif National pour une Paix Juste et Durable entre Palestiniens et Israéliens » - avec le soutien de la « Plateforme des ONG françaises pour la Palestine » - pour la rupture du partenariat entre France Telecom Orange et l’opérateur israélien Partner Communications en est un exemple particulièrement important.
Des succès sont remportés dans cette bataille politique. La liste serait trop longue à énumérer ici. Notons que le site des colons « Arutz 7 », citant les noms de quelques entreprises ayant quitté la colonie de Barkan, dénonce l’incapacité du gouvernement israélien à s’y opposer.
De plus en plus de voix s’élèvent pour demander que la colonisation soit sanctionnée. La dernière en date est celle de l’Internationale Socialiste qui, lors de son 24ème Congrès, soutient le boycott des produits des colonies israéliennes.
En octobre 2010 le PS tenait une convention pour définir son programme de politique étrangère. Laurent Fabius en tant que rapporteur y déclarait :
« Nous romprons avec l’indulgence excessive du gouvernement français envers le pouvoir israélien à qui nous dirons qu’il devra quitter rapidement les territoires colonisés. »
La France va-t-elle enfin prendre des mesures concrètes à la hauteur de la gravité de la situation ?
Robert Kissous, membre du Bureau National de l’AFPS