Les nouvelles apaisées en provenance de Palestine n’étant pas légion, on commencera par se réjouir du retour du Trio Joubran, après un silence discographique de sept ans. Les trois frères de Nazareth, Adnan, Samir et Wissam, avaient célébré en 2013 une décennie à faire virevolter leurs trois ouds, lors d’une tournée triomphale passée par l’Olympia. Comment, dès lors, réinventer une formule dont ils avaient exploré chaque variation ?
Si The Hanging Moon expose leur art dans sa quintessence - développements narratifs majestueux, ruptures entre plages contemplatives et envolées fulgurantes -, les autres titres repoussent les murs de leur univers, grâce à un méticuleux travail sur le son (légères nappes de synthés) et à la présence de plusieurs invités, conviés à un dialogue harmonieux. Le timbre, rauque, puissant, du poète palestinien Mahmoud Darwich ; celui, gracile, de l’Iranien Mohammad Motamedi (The Long March) ; Vincent Taurelle et son piano sur Clay ; des ensembles de cordes, classiques sur The Trees At War et More Than Once, orientales sur Our Final Songs.
Le nom le plus illustre est celui de Roger Waters, grand défenseur de la cause palestinienne. Indigné par la mort, dans un bombardement israélien, de quatre cousins sur une plage de Gaza, l’ex-bassiste de Pink Floyd déclame Carry The Earth, avec un contrepoint féminin, avant que les ouds reprennent le fil d’une mélodie élégiaque. Enregistré à Paris et produit par Renaud Letang (Manu Chao, Souchon), The Long March inscrit un instrument séculaire dans une modernité irréfutable et place, le temps d’un album, la Palestine au centre du monde.
Note L’Express : 16/20
The Long March, par Le Trio Joubran (Cooking Vinyl/Sony Distribution). Le 24 octobre au Théâtre des Bouffes du nord, Paris ( Xe), le 25 à Cenon (Gironde). Le 1er avril 2019 Salle Pleyel, Paris (VIIIe).
Photo de couverture : Le Trio Joubran. (Vartan Kelechian)