Ramallah, 26 septembre 2012 – Addameer et Al-Haq sont profondément inquiets pour la vie du gréviste de la faim palestinien restant, dans les prisons israéliennes, Ayman Sharawna, qui en est maintenant à son 88e jour de grève de la faim. Ayman a reçu la visite, le 24 septembre, au centre médical de la prison de Ramleh, de l’avocat d’Addameer Fares Ziad, qui a rapporté qu’il y a eu une sérieuse dégradation de son état de santé.
En réponse au refus des autorités israéliennes de le relâcher et pour davantage accentuer sa grève, Ayman a décidé d’arrêter de boire de l’eau pendant cinq jours du 16 au 20 septembre, durée pendant laquelle son poids a diminué de sept kilos. La dégradation de son état de santé comprend une perte de la vue à l’œil gauche et la perte de toute sensation dans la jambe droite.
Comme rapporté précédemment, Ayman a déjà perdu 80 % de vision à l’œil droit, ce qui signifie qu’Ayman est devenu presque totalement aveugle. Il continue à souffrir de graves problèmes rénaux et a commencé à éprouver une perte partielle de mémoire. Ayman continue aussi à souffrir de douleurs dans le dos qui demeurent non soignés puisque le Service des Prisons Israélien (SPI) a déclaré qu’il ne lui serait donné un traitement soulageant ses douleurs que s’il arrête sa grève.
Selon l’Avocat Ziad, Ayman ne voulait pas se remettre à boire de l’eau, mais il l’a fait à contrecœur par crainte d’une dégradation de son état de santé, particulièrement en raison de sa perte de vision oculaire et de sensation aux jambes. Ayman a déclaré qu’il refusera une fois de plus de boire de l’eau en commençant ce vendredi 28 septembre. Ayman a été ré-arrêté en janvier après avoir été relâché dans l’accord d’échange de prisonniers en octobre 2011. Il est actuellement détenu sans inculpation et le conseil militaire n’a pas encore pris de décision concernant le retour ou non d’Ayman à la sentence antérieure.
L’Avocat Ziad a rendu visite aussi à Hassan Safadi qui a suspendu sa grève de la faim le 21 septembre après 93 jours de grève de la faim recommencée. A la suite d’un appel le 20 septembre contre la prolongation de sa détention administrative par Israël, le juge militaire a décidé que son ordre de détention administrative en cours, qui doit expirer le 28 octobre ne serait pas renouvelé après cette date.
L’Avocat Ziad n’a pas pu rencontrer Samer al-Barq qui aurait aussi suspendu le 21 septembre sa grève de la faim historique recommencée de 123 jours, à la suite de négociations entre l’Autorité palestinienne et l’Egypte, qui ont eu pour résultat un accord de l’Egypte pour accueillir Samer s’il est relâché par Israël. Israël n’a encore fait aucune annonce relative à son transfert.
Addameer et Al-Haq saluent les courageuses grèves de la faim de Hassan et Samer et espèrent une juste résolution du cas d’Ayman aussitôt que possible. Néanmoins, bien que la libération potentielle de Samer de sa détention administrative doive être bien accueillie, Addameer et Al-Haq sont obligés de mettre en évidence leurs inquiétudes quant aux aspects de l’accord proposé qui sont fondamentalement en contradiction avec le droit international. La libération proposée de Samer dépend de sa déportation en Egypte.
Il y a de nombreux exemples d’accords semblables, passés par Israël, relatifs au transfert forcé et la déportation de prisonniers politiques palestiniens ou de personnes recherchées. Plus récemment, l’ancienne gréviste de la faim et détenue administrative Hana Shalabi a été transférée vers la bande de Gaza pour une durée de trois ans. Dans l’accord d’échange de prisonniers d’octobre 2011, 18 prisonniers de Cisjordanie, comprenant ceux de Jérusalem-Est, ont été aussi transférés de force vers la Bande de Gaza pour une durée de trois ans, tandis que 146 prisonniers supplémentaires y ont été replacés de force de façon permanente comme condition de leur libération. 41 prisonniers supplémentaires ont été déportés hors des Territoires Palestiniens Occupés (TPO).
Les termes de ces expulsions violent l’article 49 de la Quatrième Convention de Genève, qui interdit les transferts forcés et les déportations de personnes sous protection, une interdiction qui est une partie du droit humanitaire international en usage. La déportation illégale ou le transfert constitue aussi une grave infraction de la quatrième Convention de Genève (CGIV) et donc la qualifie comme un des plus graves crimes de guerre. Etant donné la forte asymétrie de pouvoir, résultant de l’occupation par fait de guerre, entre les parties palestinienne et israélienne concernées, ni le “consentement” possible du prisonnier, Samer al-Barq dans le cas présent, ni le fait que ces accords aient été négociés par une administration palestinienne, ne peuvent servir de justification de la déportation puisqu’elle enfreint l’esprit des articles 7, 8, et 47 de la
CGIV relative à l’inviolabilité des protections apportées par la Convention.
Addameer et Al-Haq réaffirment que le transfert forcé et la libération conditionnelle ne sont pas une alternative à la cessation par Israël de sa pratique de la détention administrative. Il est impératif d’exiger une résolution permanente sur la pratique d’Israël de détention arbitraire, conforme au droit humanitaire international. Addameer et Al-Haq appellent la communauté internationale à intervenir et à exiger qu’Israël se soumette immédiatement à ses obligations juridiques, cesse sa politique de détention administrative et apporte des soins médicaux appropriés et fiables à tous les prisonniers faisant la grève de la faim.
Traduit de l’anglais par Yves Jardin, Groupe de travail prisonniers