Bombarder des ponts que l’on peut contourner en voiture ou à pied, s’emparer d’un aéroport qui est en ruines depuis des années [1], détruire une centrale électrique, plonger une bonne partie de Gaza dans le noir, distribuer des tracts qui préviennent la population de faire attention à son propre sort, survoler le palais de Bashar al Assad [2] pour le menacer, arrêter des responsables du Hamas élus. Le gouvernement veut nous convaincre que toutes ces actions ont pour seul but la libération du soldat Gilad Shalit.
Mais plus la créativité du gouvernement pour inventer de nouvelles tactiques est grande, plus elle semble refléter une perte de direction plutôt qu’une conception globale basée sur la raison et le sens commun.
En apparence Israël veut exerceer une plus forte pression sur la direction politique du Hamas et sur l’opinion publique palestinienne afin de l’amener à pousser son gouvernement à libérer le soldat. En même temps le gouvernement prétend que c’est la Syrie, ou au moins Khaled Meshal, qi y vit, qui détient la clé.
Si c’est le cas, pourquoi faire pression sur la direction palestinienne locale, qui n’était pas au courant que l’attaque était plannifiée, et qui, quand elle l’a appris, a demandé que les ravisseurs prennent soin du soldat et le rendent ?
La tactique de la pression sur les civils a déjà été appliquée, et plus d’une fois. Les Libanais, entre autres, ont l’habitude de la tactique israélienne qui consiste à détruire des centrales électriques et des infrastructures.
Des villages entiers au sud Liban ont vécu sous la terreur, la population fuyant par milliers vers Beyrouth. Cependant, ce qui se produit aussi dans de telles circonstances, c’est que les divisions locales disparaissent et qu’une direction forte et unie émerge.
Finalement Israël a été contraint à négocier avec le Hezbollah et à se retirer du Liban. Il semble que maintenant le gouvernement ressorte ses tactiques libanaises et les mette en application comme s’il n’avait rien appris depuis. On peut imaginer que les résultats seront les mêmes cette fois ci.
Israël a aussi enlevé des gens au Liban, comme monnaie d’échange dans les négociations avec les ravisseurs de soldats israéliens. Il essaie maintenant cette tactique sur les responsables politiques du Hamas. Comme l’a dit le Premier ministre dans une réunion interne "Ils veulent qu’on relâche des prisonniers ? On relâchera ces prisonniers en échange de Shalit." Par "ces prisonniers," il faisait référence aux responsables du Hamas.
Le Premier ministre a été formé par un mouvement dont les dirigeants ont été autrefois exilés et qui sont revenus la tête haute et dans une position plus forte que quand ils avaient été déportés. Pourtant il pense qu’avec les Palestiniens ça marche autrement.
Olmert, qui sait bien que les militants du Hamas qui avaient été déportés par Yitzhak Rabin ont repris la direction de l’organisation, devrait savoir qu’arrêter les dirigeants ne fait que les renforcer, eux et leurs partisans.
De plus, il ne s’agit pas seulement d’une erreur de jugement : arrêter les gens pour les utiliser comme monnaie d’échange n’est pas digne d’un état, c’est du gangstérisme.
Le gouvernement s’est trouvé pris trop vite dans un tourbillon de prestige et de fatigue mêlés. Il doit immédiatement reprendre ses esprits, se satisfaire des menaces qu’il a émises, libérer les élus du Hamas emprisonnés et ouvrir des négociations.
Le problème, c’est un sodat qu’il faut ramener à la maison, pas changer la face du Moyen-orient.