En « donnant » à Israël le Plateau du Golan qui ne lui appartient évidemment pas, Trump a clairement voté pour Benyamin Netanyahou. Il a, dans un même mouvement, jeté par-dessus bord un des principes fondamentaux de l’ONU : le refus de l’annexion de territoires par la force. Et précipité l’État d’Israël dans une fuite en avant qui pourra, un jour, lui coûter très cher.
Au moment où nous écrivons ces lignes, tout porte à croire que Netanyahou se maintiendra au pouvoir au sein d’une coalition plus raciste et annexionniste qu’elle ne l’a jamais été. Avec, en guise de concurrents, des militaires qui se vantent d’avoir tué plus de Palestiniens, et qui ne semblent également savoir penser qu’en termes d’annexion et de décisions unilatérales.
Pendant les élections, la politique de colonisation, de dépossession, de blocus de Gaza, de négation des droits du peuple palestinien est plus active que jamais ; les colons sont une force électorale qui compte, et l’obsession sécuritaire fait office de pensée politique.
Alors que la protection du peuple palestinien est, dans ces conditions, une priorité, la seule force internationale d’observation, la « TIPH » qui opérait à Hébron, s’est fait renvoyer sans ménagement par le gouvernement israélien.
Pour condamner cette politique, pour rappeler le droit, pour demander qu’un nouveau bain de sang soit évité à Gaza, la voix de la France est présente à l’ONU, par son ambassadeur dont le discours garde une certaine clarté. Mais au-delà des discours, c’est le constat d’impuissance qui devient la règle. Mettre en place un mécanisme de protection de la population palestinienne ? Impossible, nous dit-on, l’État d’Israël n’en voudra pas. Porter l’exigence de la levée du blocus de Gaza ? Oui, mais seulement à travers des mécanismes agréés par l’État d’Israël. Évoquer la possibilité de sanctions alors que les crimes de guerre commis contre les Palestiniens de Gaza sont pointés par la commission d’enquête mise en place par l’ONU ? Non, on risquerait de mécontenter Israël…
Le 11 mai marquera le 70e anniversaire de l’admission de l’État d’Israël à l’ONU, ce qui supposait l’acceptation par Israël de toutes ses résolutions. Ce doit être l’occasion d’affirmer de manière claire que le droit doit l’emporter sur la force brute : en reconnaissant l’État de Palestine dans ses frontières d’avant juin 1967, en réaffirmant le droit au retour des réfugiés palestiniens, en affirmant la volonté d’en finir avec les faits accomplis. En faisant preuve de courage politique, tout simplement.
Ce sont de nouveaux rapports de force qu’il faut construire, et les sociétés civiles doivent y prendre toute leur part.
Aux États-Unis, la politique israélienne n’est plus acceptable pour une bonne partie de l’électorat juif américain : c’est une transformation considérable qui s’est ainsi engagée.
En France, les tentatives de légiférer pour faire l’amalgame entre antisionisme et antisémitisme ont été massivement rejetées. Ce qui n’a pas empêché Emmanuel Macron, dans son discours au dîner du CRIF du 20 février, de tenter de conforter ces amalgames, de promouvoir une définition manipulée de l’antisémitisme, et d’attaquer une fois de plus les actions de Boycott, Désinvestissement et Sanctions. En faisant précéder ce discours pitoyable d’un appel téléphonique à Benyamin Netanyahou, le jour même où celui-ci annonçait son alliance avec l’extrême extrême droite raciste, héritière des idées du rabbin Meir Kahane… Au nom de la lutte contre le racisme, cherchez l’erreur…
Le combat pour les droits du peuple palestinien, c’est aussi notre combat contre les ingérences de l’État d’Israël et de ses soutiens inconditionnels contre nos libertés. C’est un combat qui demande courage et persévérance. Nous n’en manquerons pas.
Bertrand Heilbronn, 2 avril 2019