- Le président palestinien Mahmoud Abbas. Image : ATEF SAFADI/EPA
C’est fait. Mercredi à New York, la Jordanie a remis aux quatorze autres Etats siégeant au Conseil de sécurité de l’ONU un projet de résolution réclamant la négociation d’un accord de paix israélo-palestinien en 2015. Et la fin de l’occupation israélienne en 2017. Le texte prône la coexistence pacifique entre « deux Etats indépendants, démocratiques et prospères : Israël et un Etat palestinien viable et contigu », dans les frontières d’avant 1967 et avec Jérusalem comme « capitale partagée ». Une initiative qui met les Etats-Unis dans une position des plus inconfortables. Voyez plutôt.
Officiellement, la Maison-Blanche martèle qu’un accord de paix ne peut résulter que de négociations directes entre Israéliens et Palestiniens, et non d’une initiative unilatérale à l’ONU. En clair : la paix, ça ne se décide pas de l’extérieur. Cela dit, Washington cherche à manœuvrer pour éviter d’avoir à opposer comme d’habitude son veto en cas de vote au Conseil de sécurité. Et pas seulement à cause de l’état exécrable des relations entre le président Barack Obama et le premier ministre Benjamin Netanyahou ! Les Etats-Unis ne veulent pas paraître isolés au moment où ils comptent sur l’aide des pays arabes pour combattre le groupe « Etat islamique » (Daech) en Syrie et en Irak.
La France l’a bien compris, qui planche avec le soutien des Britanniques et des Allemands sur un texte de compromis acceptable à la Maison-Blanche. Une résolution prévoyant une grande conférence internationale capable de ramener les deux parties à la table des négociations, suite à l’échec en avril dernier des efforts diplomatiques déployés par le secrétaire d’Etat américain, John Kerry. Ce n’est pas gagné, bien sûr. Mais si au final les Etats-Unis s’abstenaient de mettre leur veto, ce serait tout bonnement historique.
La Palestine – qui avait obtenu il y a deux ans à l’ONU le statut d’Etat non-membre – met à nouveau la pression sur les Etats-Unis en menant campagne sur tous les fronts diplomatiques. Avant-hier dans la Cité de Calvin, les 126 Etats réunis pour la conférence sur le respect de la IVe Convention de Genève dans les Territoires palestiniens ont appelé Israël à cesser de violer au quotidien le droit international humanitaire.
Le même jour à Strasbourg, le Parlement européen apportait un appui « de principe » à la reconnaissance d’un Etat palestinien, suite à des votes similaires ces dernières semaines en France et au Royaume-Uni (tous deux membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU), mais aussi en Espagne ou encore au Portugal. Or, si les gouvernements des pays d’Europe occidentale se refusent encore à reconnaître l’Etat de Palestine, ils sont clairement sous pression pour pousser Israël à négocier. Et donc pour démarcher leur grand allié : les Etats-Unis.
Last but not least, pour la toute première fois lundi à Rome, un représentant palestinien, l’ambassadeur Riyad Mansour, en poste à New York, s’est exprimé devant l’assemblée des Etats membres de la Cour pénale internationale (CPI). L’Autorité palestinienne ne cache pas qu’en cas d’échec de son offensive actuelle, elle compte passer à « une nouvelle phase », comprenant notamment sa demande d’adhésion à la CPI afin d’y mettre Israël en accusation pour crimes de guerre à Gaza.
Reste à savoir si en Israël, où la campagne pour les législatives anticipées du 17 mars a commencé, cette offensive palestinienne resserrera les rangs derrière Netanyahou… ou fera triompher le centre gauche favorable aux pourparlers.