Après le décès du président Yasser Arafat, le peuple palestinien s’est trouvé une fois de plus à la croisée des chemins.
Il a du faire face aux défis créés par un système politique fermé et rigide qui n’avait pas évolué pendant longtemps, sous la direction de Yasser Arafat.
Le défi consistait à assurer un transfert de pouvoir pacifique et démocratique alors que sur le terrain la situation était sombre. Les Territoires palestiniens vivaient sous un siège total, imposé par les forces d’occupation israéliennes, qui touchaient tous les domaines de la vie de la population.
Malgré les difficultés, les forces politiques palestiniennes ont réussi une passation d’autorité pacifique, en respectant la loi.
De plus elles se sont immédiatement préoccupées de préparer l’élection présidentielle.
A vrai dire l’élection présidentielle en Palestine pourrait servir de modèle au reste de la région.
L’élection présidentielle a été caractérisée par une concurrence réelle car plusieurs candidats postulaient à la présidence de l’Autorité Nationale Palestinienne. Ceci est très inhabituel dans une région du monde où la politique est en général un one-man show et où les résultats des élections sont connus d’avance.
L’élection présidentielle en Palestine a non seulement montré le chemin de la réforme du système politique local, mais elle a aussi contribué à lancer un processus de réforme dans d’autres parties du Moyen-Orient.
L’une des conséquences importantes de l’élection a été la formation d’une alliance démocratique ou, comme le disent les Palestiniens, une troisième voie.
L’alliance démocratique était représentée par Mustafa Barghouti qui a réussi à obtenir 20% des voix. Ces résultats donnent du poids à l’idée qu’il y a un potentiel politique énorme pour la formation d’un nouveau pillier dans le système politique.
Le système bipolaire actuel pourrait bien disparaître si l’alliance démocratique est renforcée et a la possibilité de se participer aux prochaines élections, pour le Conseil Législatif Palestinien (CLP).
De plus, l’élection présidentielle a donné l’espoir que des pourparlers de paix pourraient reprendre entre les Palestiniens et les Israéliens, dans le cadre de la Feuille de Route.
Les engagements pris par les deux parties au sommet de Charm el Cheikh semblaient suggérer qu’un nouveau départ était possible, que le processus de paix pouvait être remis en route et que la confiance était envisageable.
Pourtant les réalités de la situation actuelle sur le terrain racontent une autre histoire.
Les conditions de vie des Palestiniens demeurent très dures. Les difficultés sociales et économiques et une souffrance humaine insupportable, créées par les bouclages, les sièges et la répression qu’infligent les forces d’occupation israéliennes, restent la norme.
Dans le même temps, le gouvernement israélien continue sa politique d’annexion, d’expropriation de terres, de construction de colonies et poursuit l’érection d’un mur de séparation sur le sol palestinien, au mépris absolu de l’Avis consultatif de la Cour Internationale de Justice qui a déclaré que la construction du mur est une violation du droit international.
Qui plus est, le gouvernement israélien, avec le soutien total des Etats-unis a présenté son plan unilatéral de désengagement de Gaza comme la seule option politique possible, bloquant de fait toute autre processus politique significatif
Israel insiste sur le maintien de la nature unilatérale de son plan et entend lier tout engagement, tel que prévu par la Feuille de Route, à des conditions que la partie palestinienne est tenue de remplir, avec Israël dans le rôle du juge qui décidera de l’obéissance palestinienne.
Le résultat en est le gel total de la Feuille de Route et la continuation des violations par Israël des engagements qu’il a pris devant le Quartette dans la cadre de la Feuille de Route.
Tandis que se déroulent des discussions politiques, la situation sur le terrain se détériore constamment, à tous niveaux.
Selon des estimations de la Banque Mondiale, le chômage atteint 50 % de la force de travail et le taux de pauvreté a atteint des niveaux inconnus jusqu’alors, à savoir que l’on estime que deux tiers des Palestiniens vivent en dessous du seuil de pauvreté.
Les Palestiniens sont soumis à des violations constantes de leurs droits humains élémentaires et de leurs droits politiques.
Le Mur de Séparation a transformé la Cisjordanie en un ensemble d’îlots isolés et a détruit non seulement la contiguïté des Territoires palestiniens mais aussi la cohérence même de la société palestinienne.
La situation décrite ci-dessus a des conséquences importantes sur le développement des Territoires palestiniens. Le secours d’urgence reste la priorité dans cette situation hautement volatile.
Cependant le besoin d’une perspective de développement à long terme est également pressant. Les questions de réforme politique et de transformation démocratique doivent rester les priorités sur l’agenda palestinien.
La situation politique instable créée par l’occupation militaire israélienne d’une part et par le fait que le gouvernement palestinien se repose largement sur ses forces de police, a entraîné une situation très complexe.
La société civile palestinienne est face à quatre défis :
Le premier : continuer à résister à l’occupation militaire israélienne par des moyens civiques non violents.
Le deuxième : répondre aux besoins d’urgence de la population palestinenne dans différents domaines du développement.
Le troisième : influencer la politique publique et faire pression pour des réformes de l’Autorité Nationale Palestinenne (ANP)
Le quatrième : maintenir la cohérence et la persévérance du peuple palestinien et continuer à promouvoir les valeurs civiques et démocratiques.
Bien que ces défis puissent apparaître comme des questions séparées, ils sont liés. Ils font tous partie du combat pour une réforme démocratique qui est un pré-requis essentiel pour créer des structures sociales renforcées qui puissent résister à l’occupation israélienne. Les Palestiniens sont déchirés par cette situation complexe.
Dans le même temps, le gouvernement israélien prévoit de se désengager de Gaza tout en le maintenant entouré de toutes parts par les troupes israéliennes et en ne permettant aucune contiguïté entre Gaza et la Cisjordanie.
Le désengagement va transformer la “Palestine” en îlots isolés et non intégrés alors que le Mur de Séparation va sortir Jérusalem de son contexte palestinien et amènera finalement à l’annexion de facto de la ville par le gouvernement israélien.
Alors que les perspectives de paix et de stabilité régionales sont très sombres, il faut aider le peuple palestinien à surmonter les difficultés sociales et économiques et encourager les initiatives de réforme politique et sociale de la société civile palestinienne.
Il est tout aussi impératif d’apporter au peuple palestinien le soutien politique dont il a besoin afin d’imposer à Israël de se plier au droit international, y compris le droit humanitaire international et les droits humains.
Exercer des pressions sur le gouvernement israélien est un outil important pour créer une nouvelle donne qui ne dépendrait pas seulement des souhaits des gouvernements mais prendrait aussi en compte la volonté de la société civile, en Israël, en Palestine et dans le reste du monde.
C’est dans ce cadre que la campagne pour le désinvestissement, le boycott et les sanctions contre Israël apparaît comme une stratégie cruciale que doit adopter et mettre en application le mouvement de solidarité contre l’occupation militaire israélienne et pour une paix juste et durable au Moyen-Orient.
Une nouvelle constellation, de cette nature, finirait par changer les réalités politiques et améliorer la situation sur le terrain pour toutes les parties concernées.