La Jordanie a demandé au gouvernement israélien de lui remettre le corps du prisonnier palestinien Sami Abu Diak, décédé le 26 novembre dans une prison israélienne. Dans le même temps, le ministre israélien de la Sécurité, Naftali Bennett, a décidé de ne pas rendre les corps de martyrs palestiniens, quelle que soit leur faction.
Le reportage du journal Israel Hume, publié le 27 novembre, indiquait que l’ambassade de Jordanie en Israël avait officiellement demandé à Israël de remettre le corps d’Abu Diak à sa famille en Jordanie où elle veut l’enterrer.
Elle a également demandé des informations sur les circonstances de la mort d’Abu Diak et sur son état de santé pendant son incarcération, alors que le rapport ne mentionnait pas la position d’Israël sur la demande de la Jordanie.
Le ministre jordanien des Affaires étrangères, Ayman Safadi, a annoncé qu’Amman s’employait à rapatrier le corps de Abu Diak.
De son côté, Naftali Bennett a demandé à l’armée israélienne et aux services de sécurité israéliens de se préparer à ne plus libérer les corps des palestiniens morts, décision à laquelle s’opposent des responsables des services de sécurité israéliens qui considérent que « la préoccupation publique à ce sujet porterait préjudice aux canaux en cours sur le sujet. »
La décision de Bennett concerne tous les corps des palestiniens morts « détenus par Israël et ceux qui le seront à l’avenir, sans égard aux affiliations organisationnelles et à la forme de l’opération menée ou tentée de l’être. »
En 2019, cinq prisonniers palestiniens ont été tués, selon le club des prisonniers : Sami Abu Diak, Farés Baroud, Omar Awni Younis, Nassar Taqatqa et Bassam Sayeh.
Abu Diak est décédé le 26 novembre au matin, à l’hôpital pénitentiaire de Ramleh, après une longue maladie, accompagnée de négligence médicale systématique pratiquée par les autorités d’occupation israéliennes.
Abu Diak, 37 ans, résidant à Silat al-Dhahr, dans le district de Jénine au nord de la Cisjordanie, a été arrêté en juillet 2002 et condamné à la prison à perpétuité trois fois. En 2015, il a subi l’ablation de parties de son intestin qui ont entraîné une insuffisance rénale et pulmonaire, selon la commission chargée des affaires de prisonniers.
« Bennett fait du commerce avec les corps »
Hassan Jabareen, avocat et fondateur de l’ONG Adalah pour les droits de l’homme, a déclaré que les instructions de Bennett de garder les corps des martyrs palestiniens et de ne pas les restituer à leurs familles constituaient « une tentative de faire commerce des corps de personnes qui ont le droit au respect et à l’inhumation. Aucun pays au monde ne se permet d’utiliser les corps comme une carte de négociation politique. »
Ces pratiques ne violent pas seulement le droit international, mais aussi le droit des nations, en particulier la Convention internationale contre la torture, qui interdit les pratiques cruelles et inhumaines à l’encontre de toute personne.
Jabareen, qui représente les familles de martyrs dont les corps sont détenus, a rappelé qu’il s’efforçait « de faire face à cette décision et de révoquer ces instructions devant la justice en Israël, mais aussi au niveau des comités des droits de l’homme des Nations Unies et de diverses organisations internationales. »
Adalah a réussi à obtenir une ordonnance de la Cour suprême israélienne le 14 décembre 2017, qui interdit la détention des corps et la considère comme illégale. Sauf que le tribunal a donné six mois aux autorités israéliennes pour libérer les corps, au cours desquels elles peuvent trouver des motifs légaux de détention.
Cependant, le 19 février dernier, la Cour suprême israélienne a accepté la demande du ministère public de réexaminer la décision antérieure du tribunal qui empêchait la détention des corps, et a décidé de faire réexaminer sa décision par un organe judiciaire élargi composé de sept juges. Il a également émis une ordonnance de précaution interdisant la libération des corps jusqu’à sa décision.
Le Club des prisonniers a souligné que 222 prisonniers sont morts dans les prisons israéliennes depuis 1967, dont 67 sont décédés des suites d’une négligence médicale délibérée.
Selon des données officielles palestiniennes, le nombre de prisonniers palestiniens dans les prisons israéliennes s’élevait à 5 000, dont 200 enfants, 40 prisonnières, 400 détenus administratifs (sans inculpation) et 700 prisonniers malades.
Traduction de Moncef Chahed du Groupe de travail prisonniers de l’AFPS