Un an après la fin de l’offensive israélienne sur la bande de Gaza, peu a été fait pour soulager la détresse provoquée par l’agression d’Israël et par le bouclage en cours de la bande de Gaza. La communauté internationale a échoué à tenir Israël pour responsable de la mort de 1543 civils palestiniens, dont 550 étaient des enfants. La situation des Palestiniens en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, continue également à se détériorer. Année après année, l’occupation persiste alors que la communauté internationale ne parvient pas à mettre un terme à l’impunité israélienne.
C’est cette situation qui a suscité l’appel lancé en 2005 par la société civile palestinienne pour appeler à des initiatives de boycott, désinvestissement et sanctions (BDS), et qui provoque sa croissance continue au niveau mondial. Fondamentalement, BDS est un mouvement non-violent qui appelle à faire rendre des comptes pour les violations des droits humains. Les personnes impliquées dans le BDS devraient avoir leurs droits à la liberté d’expression, d’opinion et d’association, entre autres, garantis. Au contraire, au fur et à mesure que BDS a fait les gros titres, les opposants ont cherché à délégitimer le mouvement. Dans un tel climat, il est nécessaire de distinguer les obligations juridiques de l’action politique.
Cela commence par le "B." Le boycott signifie un choix : une consommation éthique comme moyen d’apporter des changements. Par le boycott, la charge de mettre Israël face à ses responsabilités est portée par le public au sens large - pas sur les gouvernements. Les initiatives visant à étiqueter les produits des colonies ne feront qu’informer les consommateurs d’une origine des produits ; mais les marchandises arriveront toujours sur les marchés nationaux.
Cette préoccupation a été l’une des principales raisons pour lesquelles Al-Haq, la plus ancienne organisation palestinienne des droits de l’homme dont je suis le directeur, n’a pas rejoint les autres membres de la société civile palestinienne dans l’appel BDS lancé en 2005. Plus précisément, Al-Haq estime que, en vertu du droit international, les États eux-mêmes ont le devoir de respecter et de garantir le respect de la loi. Cette position a été exposée dans le rapport 2013 « Feasting on the Occupation”. <span class='ressource spip... ,” qui a montré que le projet de colonisation d’Israël et les pratiques qui l’accompagnent, violent ses obligations en droit international humanitaire et les droits humains. Les Etats, et non les citoyens individuels, ont le devoir de ne pas reconnaître comme légale une situation résultant d’une conduite illégale, ainsi que le devoir de coopérer afin de mettre un terme ces violations.
Les produits issus des colonies agricoles et industrielles israéliennes sont essentielles pour renforcer l’entreprise de colonisation illégale, et fournissent des revenus vitaux qui contribuent à assurer leur viabilité et leur croissance. Par conséquent, les Etats échouent à se conformer à leurs obligations juridiques internationales en permettant aux produits des colonies de pénétrer les marchés nationaux. En ne décrétant pas l’interdiction des produits des colonies, les États eux-mêmes politisent une question juridique et reportent le fardeau sur les consommateurs.
Alors que Al-Haq reste engagé à ne défendre qu’une interdiction des produits des colonies, à surveiller la responsabilité des entreprises, et à travailler dans les limites de notre mandat, fondé sur le respect du droit international dans les territoires palestiniens occupés, nous appuyons essentiellement BDS comme une campagne non-violente. Nous le considérons comme complémentaire à notre travail, et nous voyons notre travail comme complémentaire au leur. Plus de personnes que jamais comprennent que l’occupation est alimentée par le contrôle des terres et des ressources, et que la rentabilité des entreprises des colonies contribue à renforcer ce contrôle. Les deux "B", interdiction et boycott, nous rapprocheront de la fin de l’occupation.
Shawan Jabarin
Shawan Jabarin est Directeur général de Al Haq, une organisation de défense des Droits de l’Homme palestinienne. Il est vice-président de la FIDH - la Fédération internationale des Droits de l’Homme – et il est membre de la Commission internationale des juristes.
Traduction RP AFPS