Une nausée mêlée aussi d’une profonde colère devant les méthodes employées par certains pour le discréditer effroyablement et anesthésier tout débat sur le Proche-Orient. Cet hallali contre lui dure depuis plus de 16 ans. Il n’est basé sur aucun fait tangible – strictement aucun – par quelques individus, peu nombreux mais très actifs et chassant en meute. Il est le fait de quelques membres hautement déclarés comme appartenant la communauté juive de notre pays, le CRIF ne négligeant pas évidemment d’apporter sa « contribution » à toutes ces avanies déversées contre lui.
Que quoi s’agit-il ? En 2.001 à la demande de la direction de son parti, le PS, Pascal Boniface est chargé de faire une note sur le positionnement de celui-ci sur ce qu’il est convenu d’appeler « le conflit israélo-palestinien ». Directeur de l’IRIS, institut qu’il a créé en 1990, cet universitaire et géo-politologue dispose de connaissances certaines en la matière. Il la rédige et la remet à sa direction (cette note est publiée de nouveau dans ce livre). Il estime que son parti n’est pas en adéquation avec les valeurs universalistes dont il se réclame ni avec les réalités et le droit international. Cela devrait amener, selon lui, le PS à se défaire de son alignement quasi systématique sur la politique israélienne. Cette note interne, va vite « fuiter » comme par hasard, et provoquer une première série d’attaques sur le thème déshonorant et échappant du champ du débat loyal – des attaques qui sont en fait des insultes infâmes contraires à tout ce qu’est et fait Pascal Boniface. Pour eux, il est « antisémite ».
Ces thuriféraires de la politique israélienne craignent alors un bouleversement dans la position du Parti socialiste jusqu’à là « pro-israélien », parti qui avait alors un tout autre poids politique et moral qu’aujourd’hui. L’enjeu est énorme pour eux. Il faut donc le salir à tout prix sans entrer en aucun cas dans le débat, le salir jusqu’ à le rendre infréquentable et l’isoler. Pourtant ce débat sur la politique israélienne est légitime et indispensable. Il est politique. Il ne peut être naturellement pas être évacué des prises de position de partis qui sont de plus, comme l’était alors le PS, un « parti de gouvernement ».
Devant l’attitude peu courageuse de dirigeants de son parti qui cèdent devant cette offensive déshonorante, Pascal Boniface quitte le PS. Cela, loin de calmer ses détracteurs, ne fait que les rendre plus hystériques encore. Ils estiment sans doute avoir déjà remporté une victoire. Ils veulent aller jusqu’au bout : atteindre son Institut.
Qu’importent les faits, qu’importe que jamais Pascal Boniface n’ait été jugé ou déclaré coupable une seule fois, et pour cause, d’un tel délit monstrueux par la Justice, qu’importe que toute sa vie durant il se soit battu contre tous les racismes, qu’importe la réalité, il doit être « exécuté ».
Pour ces illuminés Pascal Boniface constitue un danger public dès lors qu’il met en cause la politique des dirigeants israéliens et non point l’existence de l’Etat israélien – ce serait d’ailleurs plus facile pour eux s’il tel était le cas ! Qu’importe cette différence qui est de taille entre « antisionisme » (qui est une opinion) et « antisémitisme » (qui est un délit), ils en feront un puant « amalgame » entre les deux et y ajouteront quelques autres avanies et coups-bas. Chez ces gens-là on ne chipote pas, on ne discute pas. On cogne.
Et ainsi s’établit une « rumeur » – qui est inverse dans son objet à celle d’Orléans – qui se répand mettant en cause l’homme, sa famille, son honneur mais aussi par voie de conséquence son Institut. Dans son livre Pascal Boniface détaille les mille manœuvres, toutes plus sordides les unes que les autres, dont il est l’objet. Il le fait avec minutie et sans énervement. Froidement. Reste que le mal est fait et qu’il existe toujours. Jusqu’à ce nouveau converti, Manuel Valls, qui a avoué crânement, tout récemment, avoir écrit aux Ministères des Affaires étrangères et de la Défense pour leur demander de couper les maigres vivres versés par ces ministères à IRIS. La raison ? Selon lui, ce qu’écrit Pascal Boniface « pose problème ». Cette fois, suite logique, on est dans un totalitarisme certain et une démarche frontalement attentatoire à la liberté d’expression qui est un fondement absolu et non-négociable de notre démocratie.
Pascal Boniface a eu bien raison, avec ce livre, de porter sur la place publique son chemin parsemé de fiel et jamais de « lait et de miel ». Car cela fait 16 ans que cela dure hors toute raison et que cela réduit son espace et ses relations ; parce que cela dessèche et ampute le débat politique ; parce que cela atteint son honneur et celui de sa famille ; parce que cela vise un Institut classé parmi les meilleurs au monde. On ne peut pas, on ne peut plus laisser pareilles saloperies se développer de la sorte. Car « saloperie » est le mot qui convient en l’occurrence. Lisez ce livre et vous le constaterez par vous-mêmes.
Ce livre m’inspire plusieurs remarques qu’il m’a fallu du temps pour écrire tant ma colère pouvait être mauvaise conseillère.
Tout d’abord certains milieux veulent empêcher tout débat sur la politique des dirigeants israéliens. Ils parlent de paix, à l’occasion et très vaguement, mais ils se gardent bien de condamner ce qui la rend impossible : l’occupation israélienne. Ils ne veulent pas parler pas de cela et ils ont donc choisi cette « parade » : que le débat dévie sur toute autre chose. C’est cousu de fil blanc, sauf que cela vous colle aux pieds comme un chewing-gum et ceci quoi que vous fassiez. Un antisémite – et il y en a bien trop – ne sera pas touché par cette accusation puisqu’il l’assume. Quelqu’un qui ne l’est pas, et qui ne peut passer sa vie devant les tribunaux ni s’épuiser financièrement dans des procédures, comment se sort-il de cela ? Se justifier ? Mais pourquoi et comment ? Et puis, se justifier de quoi ? Sa vie parle pour lui.
Le second point qui me choque hautement est le suivant : je l’ai dit, ce ne sont pas des milliers de personnes appartenant à la « communauté juive » qui ont attaqué de la sorte Pascal Boniface. Ce ne sont que quelques uns. Mais ils prétendent parler au nom de tous, comme le fait le CRIF au demeurant. De sorte qu’ils alimentent une « fake news » nauséabonde qui est crue par certains esprits. Si, comme tel est le cas, l’antisémitisme ne recule toujours en France pourquoi cette démarche de quelques uns qui refusent des alliés dans ce combat indispensable ? Et non seulement mais ils s’érigent en tribunal et prétendent dire, à la place de la Justice, le droit et les peines. C’est une sorte d’Etat dans l’Etat. A vouloir se présenter comme représentants tous les Juifs de France, qui sont très divers comme tous les autres Français, mesurent-ils le discrédit qu’ils jettent de facto sur l’ensemble de cette « communauté » ? Ce sont vraiment des dangers publics.
Enfin, si je suis consterné par ces méthodes indignes et dangereuses, je m’interroge sur le fait que de tels procédés puissent avoir cours dans notre pays. Le combat politique ne peut accepter en aucun cas que la fin justifie les moyens. En ce sens le livre de Pascal Boniface m’a fortement secoué. Certes il n’a pas été seul dans ce combat mais, et cela a une portée plus générale, avons-nous été suffisamment nombreux et surtout constants à nous élever contre tout cela ? C’est une question que je pose, une question de salubrité publique que de refuser pareilles méthodes malhonnête et dangereuses. Le discrédit doit changer de camp. Il est plus que temps. Le livre de Pascal Boniface sonne pour moi comme un appel à aller en ce sens. Il a suffisamment payé et souffert de cette situation pour que nous n’oubliions pas que cela n’arrive pas qu’aux autres… Nous devons cela à la démocratie. Nous le devons aussi à lui qui est un homme intègre, réfléchi, engagé et respectueux des autres. Il a toute notre estime quand d’autres ne méritent que notre mépris.
Jean-Claude Lefort
Le 12 janvier 2018
Jean-Claude Lefort est président d’honneur de l’AFPS