Par Alexandra Schwartzbrod, Directrice adjointe de la rédaction
Edito. La politique de colonisation intensive menée par le Premier ministre israélien est lâche et dangereuse. Lâche car Benyamin Nétanyahou a attendu que son ennemi Barack Obama dégage et que Donald Trump arrive à la tête des Etats-Unis pour passer à la vitesse supérieure : depuis l’investiture du nouveau président américain, le 20 janvier, le gouvernement israélien a annoncé la construction de près de 6 000 logements supplémentaires dans les territoires occupés, en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. Et, pour couronner le tout, le Parlement israélien a voté lundi soir une loi qui permettra à l’Etat de s’approprier des centaines d’hectares de terres palestiniennes, une sorte de vol organisé et légalisé. Lâche aussi car Nétanyahou préfère céder aux colons et aux religieux, de plus en plus nombreux et puissants, plutôt que de perdre une once de pouvoir.
Dangereuse car chacun sait, lui le premier, ce que cette politique va provoquer tôt ou tard : une nouvelle éruption de violence dont le gouvernement israélien attribuera la responsabilité aux leaders palestiniens pour mieux l’écraser sous le feu en clamant qu’Israël n’a décidément aucun « partenaire » avec qui négocier la paix. Une fois les données de ce problème énoncées, que faire ?
Le drame serait justement, devant tant de prévisibilité, de lâcher l’affaire. De se dire qu’il ne sert plus à rien de s’offusquer et que les mots n’ont plus de poids face à la mauvaise foi. De constater que, depuis des années, les partisans d’une solution à deux Etats crient dans le désert et que, plus ils crient, plus les partisans d’un grand Israël en sortent renforcés. Eh bien non, il ne faut rien laisser passer. Il faut préparer la suite. Montrer que le droit n’est pas seulement fait pour être contourné. Les defenseurs de droits de l’homme ont annoncé qu’ils saisiraient la Cour suprême (équivalent de notre Conseil constitutionnel). Si Israël est un Etat démocratique, celle-ci devra déclarer le texte voté lundi contraire aux lois fondamentales du pays. Par ailleurs, la charte de l’ONU précise que les Etats membres doivent se soumettre aux décisions du Conseil de sécurité, et il se trouve que celui-ci a voté en décembre la résolution 2334 condamnant la colonisation. Il y a donc de quoi se battre. Ne lâchons pas le rêve d’un Etat palestinien au côté de l’Etat israélien.