En Israël, un projet de loi visant à légaliser rétroactivement les colonies sauvages en Cisjordanie donne du fil à retordre à Benyamin Netanyahu. Dans les cartons depuis des mois, cette loi pourrait être votée en troisième lecture à la Knesset ce lundi 6 février 2017. Et ce, contre l’avis même du chef du gouvernement israélien. Côté palestinien, on craint que cette loi ne soit votée. Des dizaines de colonies ont déjà été légalisées ces dernières années, comme à Yetma.
Avec notre correspondante de retour de Yetma, Marine Vlahovic
Si cette loi était votée, elle « blanchirait » rétrospectivement une cinquantaine de colonies de Cisjordanie actuellement non reconnues par l’Etat hébreu. Cela représente environ 4 000 logements. Les propriétaires palestiniens des zones concernées se retrouveraient automatiquement expropriés.
Benyamin Netanyahu a demandé un report du vote, préférant attendre sa visite à Washington et sa rencontre avec Donald Trump, prévue le 15 février prochain. Mais il est débordé à sa droite par le parti Foyer juif, qui souhaite maintenir l’examen de ce projet.
Quelques jours seulement après l’évacuation de l’avant-poste d’Amona, le parti nationaliste religieux souhaite donner des gages aux colons. Du côté palestinien, l’inquiétude prédomine alors que des dizaines de colonies ont déjà été légalisées ces dernières années.
Au centre de la Cisjordanie entre Ramallah et Naplouse, le village de Yetma est encerclé par des colonies légalisées et sauvages. Planté sur le seuil de sa quincaillerie, Muhammad Najar n’a qu’à tourner la tête pour apercevoir la colonie de Rehelim.
« Nous savons que c’est illégal »
Légalisée depuis 2012 par le gouvernement israélien, elle n’a cessé de grossir. « Moi, il me faut 10 ans pour construire une maison à cause des autorisations. Et eux, les colons, il leur faut seulement une nuit. Quand je me réveille le matin, je vois de nouveaux bâtiments. Mais d’où sortent-ils ? », demande le commerçant.
Car si la colonie légalisée s’est développée, une vingtaine de colonies sauvages ont poussé un peu partout à proximité de Yetma. Même le maire, Khader Khader, s’y perd en regardant sa carte. Car la bourgade de 3 000 habitants et les villages palestiniens voisins sont désormais encerclés.
Une légalisation massive enterrerait tout espoir de paix. « Les accords d’Oslo seront caducs, tout ce qu’il nous restera à faire, c’est aller devant la Cour pénale internationale pour nous défendre parce que nous savons que c’est illégal », explique Khader Khader.
Dans l’attente de cet ultime recours juridique, les habitants se battent contre la construction d’une route qui relierait entre elles les colonies sauvages, isolant ainsi la poignée de villages palestiniens. Muhammad Najar ne se départit pas de son humour : « Que les Israéliens nous donnent au moins un hélicoptère pour quitter notre village à Naplouse, ce sera plus simple pour nous. »