Au pouvoir depuis six années, Benjamin Netanyahou demeurera-t-il premier ministre israélien au terme des élections législatives qui se tiennent mardi 17 mars ? Rien n’est moins sûr tant le personnage est de plus en plus contesté pour ses politiques extrémistes, ses alliances, ses provocations, ses frasques même. En ce sens, son dernier voyage aux États-Unis, début mars, et l’irritation croissante manifestée à cette occasion par l’administration Obama, a illustré tout à la fois la force mais aussi l’usure de celui qui fait campagne sous son surnom favori de « Bibi ».
- Netanyahou devant l’Aipac, le 2 mars 2015 © Reuters
Une éventuelle défaite de Netanyahou ne devrait pas pour autant changer les contours du conflit israélo-palestinien. Il est d’ailleurs le grand absent de cette campagne électorale, aucun des grands partis israéliens n’évoquant ce que pourrait être une relance d’un « processus de paix » ruiné et à l’arrêt depuis des années malgré les gesticulations diplomatiques des États-Unis et de l’Europe.
Car les « années Netanyahou » auront réussi à repousser à un improbable horizon tout espoir d’un véritable accord israélo-palestinien pouvant déboucher sur une paix durable. Négociations à l’arrêt, colonisation de la Cisjordanie qui se poursuit, guerres récurrentes contre Gaza, pouvoir palestinien fracturé, société israélienne qui se radicalise… Toutes les évolutions de la dernière décennie vont à l’encontre de l’espoir né dans les années 1990 et dans la foulée des accords d’Oslo d’un accord mettant fin à un conflit qui est au cœur des tumultes du Moyen Orient.
Depuis 2008, Pierre Puchot couvre pour Mediapart ce conflit israélo-palestinien. En se rendant régulièrement en Israël, en Cisjordanie et à Gaza, et pas seulement pour y couvrir les guerres mais pour y raconter les sociétés palestiniennes et israéliennes ainsi que les débats qui les traversent. De ses reportages, de ses entretiens avec les acteurs palestiniens et israéliens, il a tiré un livre, publié ce jeudi 12 mars aux éditions Don Quichotte : La paix n’aura pas lieu, disent-ils. « Disent-ils », tant il nous faut malgré tout espérer même si la situation est aujourd’hui celle d’une guerre sans fin dans un chaos régional grandissant.
La lecture du livre de Pierre Puchot offre le constat glaçant d’une situation qui ne cesse d’empirer. Au point que « la solution de deux États, dans des frontières reconnues et sûres », mantra toujours énoncé par toutes les chancelleries occidentales, apparaît aujourd’hui impossible, détruite par les rivalités palestiniennes, les guerres à répétition à Gaza et une colonisation ayant fait de la Cisjordanie une juxtaposition de bantoustans.
Aussi faut-il revisiter le point de départ, ces fameux accords d’Oslo signés en 1993 et 1994 et qui devaient permettre l’établissement d’un État palestinien viable au-delà des frontières arrêtées à l’issue de la guerre de 1967. « C’est tout le contraire qui s’est passé », constate Pierre Puchot dans une longue préface. « En 2015, nul doute possible : Israël a utilisé Oslo pour rendre caduque la solution à deux États, dans une sorte de politique du fait accompli – la colonisation – puis par une tactique de guerre permanente comparable en bien des points à la doctrine américaine du containment telle que la comprenait Lyndon Johnson. » Retour à Oslo, donc : c’est l’objet de la préface de ce livre que nous publions dans les pages suivantes. Lire la suite