1. Les perspectives de paix paraissent plus éloignées que jamais
La situation est un peu plus calme, mais il n’y a pratiquement pas d’amélioration de la vie quotidienne, ce qui est le signe tout simple qu’attendent les palestiniens de base pour envisager de croire de nouveau à la paix. Les difficultés de circulation restent kafkaïennes : pour aller d’Hébron à Ramallah (50 km) un palestinien (qui ne peut pas passer par Jérusalem) mettra quatre heures si tout va bien, la journée si ça se gâte, voire n’y arrivera pas du tout. Nous avons séjourné à Hébron, l’immense majorité de la population limite ses déplacements à un tiers de cercle d’environ 20 km vers le sud / sud ouest (au centre et au nord ce sont des colonies, à l’est le désert). Au-delà c’est l’aventure, l’humiliation, donc on ne le fait que lorsque c’est indispensable. Dans ces conditions, l’économie ne peut pas repartir. Donc horizon bouché.
Au-delà de ces questions essentielles de vie quotidienne, la possibilité de deux Etats viables apparaît en tout état de cause de plus en plus hypothétique. Toutes les villes du cœur de la Cisjordanie ; Jérusalem Est, Ramallah, Bethléem, Hébron (pour ne citer que les principales) sont progressivement totalement entourées de colonies, avec leur cortège de routes impressionnantes pour les relier directement à Israël. La route qui mène de Jérusalem au pont de passage sur le Jourdain (frontière avec la Jordanie) est totalement sous contrôle israélien et bordée de colonies (la Cisjordanie est donc déjà coupée en deux).
La situation concrète est donc une imbrication des populations qui rend bien aléatoire la viabilité d’un Etat palestinien. Seule une évacuation massive de la Cisjordanie (Gaza n’est qu’une goutte d’eau) pourrait rendre à nouveau cette revendication d’un Etat palestinien viable (en parole soutenue par la communauté internationale) crédible.
Aussi, devant la situation concrète (ils n’ont pas bâti ces villes, ce réseau routier pour les abandonner, la communauté internationale n’est pas prête d’imposer l’évacuation...), on se prend à se demander si la solution ne serait pas un seul Etat.
On revient à la proposition de l’OLP d’avant 1988 (une Palestine laïque et démocratique où vivraient côte à côte juifs, musulmans, chrétiens - et les autres, ça c’est moi qui l’ajoute...). Bien sûr, la revendication du respect du droit international doit rester l’exigence centrale, mais je me demande si l’idée d’un seul Etat n’est pas entrain de reprendre corps (des palestiniens minoritaires le disent). Il y en aura pour des dizaines d’années.
Cette imbrication des populations est un fait majeur. Pour l’instant israéliens et palestiniens se côtoient en s’ignorant. Encore que, avec les besoins de main d’œuvre, les arrangements pour circuler (officieux bien sûr = en payant un palestinien peut prendre un taxi, une route réservée aux colons...)...
2. Une autre chose qui frappe en Palestine, c’est qu’il n’y a pas une école, un édifice culturel, un stade, un centre social...
qui n’ait été financé par l’extérieur. Ce peut être aussi bien les pays occidentaux (France, Japon, Pays nordiques, Portugal, Chili, Etats-Unis..., tous y vont de leur écot et l’affiche bien sûr) que via des associations islamiques locales (en réalité financées par les pays du Golfe et/ou la diaspora).
Comment peut on continuer à laisser perdurer cet assistanat qui en réalité « dédouane » la communauté internationale de son inaction. Ceci d’autant plus que celle-ci bâti, puis rebâti ce qui a été détruit (tours de télévision, aéroport et port de Gaza bientôt...), sans oublier le financement par l’Union Européenne des salaires des fonctionnaires palestiniens. Cette situation n’est d’ailleurs pas unilatérale, Israël reçoit aussi une manne plus que significative, avec les financements privilégiés américains, les dons de la diaspora, l’accord commercial avec l’Union Européenne.
Cette situation est complètement malsaine, elle habitue les populations à tout voir arriver de l’extérieur. Un véritable « sport » national est la chasse aux subventions extérieures. Les nombreuses associations, ONG palestiniennes passent leur temps à cela.
Evidemment, là on revient à mon premier point, sans solution durable imposée par la communauté internationale, il n’y a pas de raison que cette situation s’arrête. Il ne faut pas d’ailleurs, c’est entre autre ce qui permet aux palestiniens de tenir. Ad vitam æternam...Kafkaïen encore...Ainsi va la politique internationale aujourd’hui...
Gentilly le 24/08/05