Le téléphone sonne. Moriah et Chen se tendent. C’est leur fille, Tamar, si jeune, si forte. Elle dort en prison. Elle a défié la plus grande institution d’Israël, son armée, en refusant de servir pour une question de conscience.
Les parents en connaissent un rayon en matière d’engagement à gauche. Devenue récemment avocate, Moriah Shlomot fut la directrice de l’une des plus célèbres ONG du pays, La Paix maintenant. Lui, Chen Alon, professeur de théâtre, a servi pendant la première Intifada, à la fin des années 1980. Puis il a refusé d’être déployé à nouveau comme réserviste, lorsque la seconde a débuté. Il a fondé Combattants pour la paix, un mouvement regroupant des activistes palestiniens et israéliens.
Le téléphone sonne, en ce début avril, et Tamar est au bout du fil, tremblante, annonçant la bonne nouvelle. La commission chargée d’examiner une nouvelle fois son dossier a décidé de la remettre en liberté, après cent trente jours de détention. Une façon pour l’armée de se débarrasser de ce moustique si irritant. Moriah et Chen sont fiers de leur fille.
« A 4 ans, Tamar m’a vu aller en prison pour refus de servir, explique son père. La plupart de mes amis sont des refuzniks. Mais longtemps, le système lui a convenu. Ce n’est pas une rebelle. Elle a été scout. A l’école, elle faisait du théâtre. Un jour, j’ai critiqué la façon dont cette activité était dépolitisée au lycée. Elle m’a dit : “Arrête ! C’est de l’art. Je ne suis pas comme vous”… »
Divergence éthique ou politique
Pourtant, Tamar Alon se trouva tourmentée lorsque, au terme de ses années lycée, la perspective d’endosser l’uniforme militaire pour deux ans se précisa. Contrairement à beaucoup de jeunes de son âge, pour qui les territoires occupés sont une abstraction, l’adolescente connaissait cette réalité. Pendant le ramadan, elle a souvent accompagné ses parents en Cisjordanie, pour rendre visite à des amis.