Sur les 132 sièges du Conseil législatif (CLP, Parlement), le Hamas en a remporté 76 contre 43 pour le Fatah, qui dominait le CLP sortant, élu en 1996, a annoncé le président de la Commission électorale, Hanna Nasser.
Le Hamas jouira ainsi d’une confortable majorité au Parlement qui lui permettra de former le prochain gouvernement, s’il le décide, sans avoir à s’appuyer sur d’autres formations.
Les 13 autres sièges sont allés à des partis de moindre importance ou à des indépendants. Le taux de participation au scrutin, qui a eu lieu mercredi, s’est établi à 77%.
Avant même l’annonce des résultats officiels, le Premier ministre, Ahmad Qoreï, a annoncé sa démission, ouvrant la voie à la formation d’un nouveau cabinet par une personnalité du Hamas, comme le souhaite le leader palestinien Mahmoud Abbas, qui a appelé au "respect" du choix du peuple.
Le Hamas est toutefois resté flou sur ses intentions quant à la formation du gouvernement, se disant simplement prêt à "travailler" avec le Fatah. "Nous commencerons très prochainement d’intenses consultations avec le président Abou Mazen, les frères du Fatah et les autres groupes palestiniens pour nous entendre sur la nature du partenariat politique de la prochaine étape", a dit le chef de file du groupe, Ismaïl Haniyeh.
"Le problème principal c’est l’occupation sioniste et la poursuite des agressions contre notre peuple", a-t-il dit à des journalistes en affirmant que son mouvement poursuivrait sa "résistance" contre Israël.
Israël, pour qui le Hamas est responsable de dizaines d’attentats meurtriers a estimé que tout dialogue lui était conditionné par son rejet de la violence.
Ehud Olmert, Premier ministre israélien par intérim, a déclaré que l’Etat juif ne négocierait pas avec un gouvernement palestinien dont ferait partie le Hamas , et la ministre israélienne des Affaires étrangères, Tzipi Livni, a pressé l’Union Européenne de faire preuve d’une tolérance zéro vis-à-vis d’un cabinet palestinien sous la direction du Hamas, qui selon elle serait un "gouvernement terroriste".
Dans le monde arabe, seuls la Jordanie, et l’Algérie ont réagi officiellement aux résultats des élections palestiniennes :
Elles constituent "un pas important franchi par le peuple palestinien" sur la voie du recouvrement de "ses droits légitimes", a déclaré le président algérien, Abdelaziz Bouteflika.
Le ministre algérien des Affaires étrangères, Mohamed Bedjaoui, a appelé le monde occidental à juger sur pièce le Hamas, l’ invitant à passer au plus vite à la négociation.
Le roi Abdallah II de Jordanie a quant à lui appelé Israël et les Palestiniens à "reprendre rapidement les négociations de paix". "Quels que soient les résultats des élections", l’établissement de deux Etats restera "la seule solution pour instaurer la stabilité et mettre un terme à la violence et à l’extrémisme", a déclaré le souverain hachémite.
Les Frères musulmans jordaniens ont salué "cette grande victoire" du Hamas et appelé les Etats à "respecter le choix du peuple palestinien".
Les pays occidentaux ont exprimé jeudi leur inquiétude après l’écrasante victoire du Hamas , estimant que tout dialogue avec lui était conditionné par son rejet de la violence :
Le président américain, George W. Bush, dont le pays considère le Hamas comme une organisation terroriste, a pour sa part affirmé qu’il devait renoncer à vouloir la destruction d’Israël.
"Il est important que la Hamas comprenne (...) qu’il doit décider entre la voie de la démocratie et la voie de la violence", a renchéri le Premier ministre britannique Tony Blair.
L’UE, principal donateur de l’Autorité palestinienne, a indiqué qu’elle jugerait le Hamas selon sa contribution au processus de paix après son entrée au Parlement.
"Nous jugerons tout gouvernement et tout parlement palestiniens sur sa contribution au processus de paix, sur la reconnaissance d’Israël et sur la"théorie des deux Etats" devant aboutir à la reconnaissance d’un Etat palestinien", a déclaré le chancelier autrichien Wolfgang Schüssel, président en exercice de l’UE.
Moscou a demandé au Hamas d’accepter un "règlement pacifique" alors que le Premier ministre français, Dominique de Villepin, a exprimé son "inquiétude" .
Pour sa part le président palestinien Mahmoud Abbas a souligné qu’il entendait poursuivre ses efforts en vue de parvenir à un règlement de paix avec Israël.
Il a fait savoir qu’il allait engager immédiatement des consultations sur la formation d’un nouveau gouvernement qui, en conséquence du scrutin, sera tributaire du Hamas.
"Le nouveau gouvernement travaillera en respectant les accords israélo-palestiniens", a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse marquant sa première réaction officielle aux résultats des élections.
Il a insisté sur les accords d’Oslo conclus en 1993, qui ont créé l’Autorité palestinienne et avaient été rejetés à l’époque par le Hamas, et sur la "feuille de route" prévoyant l’avènement d’un Etat palestinien coexistant pacifiquement avec Israël :
"Je suis fermement attaché à mettre en oeuvre le programme politique pour lequel j’ai été élu", a-t-il poursuivi. "Et (ce programme) est fondé sur le choix de la négociation et d’un règlement pacifique du conflit avec Israël."