Dans une de ses premières déclarations sur la politique étrangère, Donald Trump a réussi à prendre par surprise de nombreux spécialistes du Moyen-Orient en faisant connaître sa volonté de réexaminer la politique traditionnelle des U.S.A. au sujet du conflit israélo-palestinien.
« J’examine la solution à deux États et à un État, et je préfère celle que les deux parties préfèrent, » a déclaré le président nouvellement élu.
Ses prédécesseurs, en revenant plusieurs décennies en arrière, ont tous été des partisans enthousiastes du modèle à deux États – c’est-à-dire, la création d’un État palestinien indépendant à côté d’Israël. A leur avis, le partage du territoire entre le Jourdain et la Mer Méditerranée approximativement le long de la frontière de 1967 était la meilleure et, en fait, la seule option pour résoudre le conflit israélo-palestinien.
Trump a ensuite fait marche arrière, en disant qu’il pensait que la solution à deux États était « plus envisageable » et qu’elle « convenait mieux , » mais, quand il a été pressé de question, a réaffirmé son discours précédent selon lequel en ce qui le concernait, toutes les options étaient possibles. « Si les Israéliens et les Palestiniens veulent un État, je suis d’accord, » a-t-il déclaré . « S’ils veulent deux États, je suis d’accord. Je suis content s’ils sont contents. »
L’opinion communément admise ces jours-ci est que le tant attendu plan de paix de Trump – l’« accord ultime, » ainsi qu’il l’a un jour appelé – sera dévoilé après les élections israéliennes du 9 avril – mais pas très longtemps après. Selon des informations récentes, l’ administration travaille sur la supposition que le parti du Likud du Premier Ministre Benjamin Netanyahu formera le prochain gouvernement d’Israël. Etant donné tout le soutien que Netanyahu a obtenu de la part de Trump, il sera certainement très difficile de rejeter d’emblée le plan de paix, dont il est généralement prévu qu’il soit une certaine variante du modèle à deux États. Les Américains parient que si le plan est présenté immédiatement après l’élection, le Premier Ministre israélien sera plus enclin à former une coalition avec des partis ouverts à un accord plutôt qu’avec les jusqu’aux boutistes qui étaient ses associés dans le gouvernement sortant.
Beaucoup de ces jusqu’au boutistes, dont des membres de son propre parti du Likoud, soutiennent une certaine forme de solution à un État.
Il y a maintenant tant d’options sur la table que lorsque les Israéliens et les Palestiniens parlent d’une solution à un État ou à deux États, ils veulent souvent dire des choses très différentes. Et même quand ils parlent entre eux, les Israéliens ne sont pas forcément sur la même longueur d’onde.
Donc que veulent dire les Israéliens quand ils parlent d’une solution à un État et à deux États ? Ce guide analyse les différentes options qui sont l’objet de débats, les arguments pour et contre elles et regarde qui soutient chaque projet.
Deux États pour deux peuples
De façon générale, la solution à deux États implique la création d’un État palestinien indépendant et démilitarisé en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza. Selon la plupart des versions de ce plan, les deux territoires seraient reliés par un couloir de 40 kilomètres (25 milles) qui comprendrait une route, une voie ferrée et des conduites pour les services publics comme celles pour l’acheminement du gaz et de l’eau. Où exactement sera tracée la frontière fait l’objet d’un débat, mais il y a un accord général pour que la frontière israélienne d’avant 1967 serve de référence. Pendant de nombreux cycles de négociations tenus au cours des 20 dernières années, les Israéliens et les Palestiniens se sont accordés sur le principe selon lequel Israël serait autorisé à annexer les grands blocs de colonies situés près de la Ligne Verte ( entre 2 à 5 % du territoire au-delà de celle-ci) en tant que partie de l’accord sur deux États afin de réduire le nombre de colons qui devraient être déplacés. En échange, Israël cèderait aux Palestiniens une portion de territoire plus ou moins équivalente pour leur futur État.
Environ 400.000 Juifs habitent dans les colonies de Cisjordanie, et ils représentent actuellement environ 6 % de la population juive totale en Israël et dans les territoires occupés. (En gros 9.000 colons qui habitaient dans le bloc de colonies de Gush Katif à Gaza ont été évacués en 2005). La logique qui sous-tend un échange de territoires est qu’elle permet à Israël de maintenir là où ils sont la grande majorité de colons. Une mince entente existe, cependant, au sujet des blocs de colonies qui devraient être compris dans l’accord. Environ 80 % des colons habitent dans les blocs de colonies de Gush Etzion, de Givat Ze’ev, de Modi’in Ilit, de Samarie Occidentale, de Ma’aleh Adumim, de Ariel, de Shaked et de Kedumim. Tous sont considérés comme pouvant prétendre à l’annexion et, tous réunis, ils constituent environ 4% de la Cisjordanie.
Certains partisans de la solution à deux États soutiennent que seuls les blocs de colonies situés près de la Ligne Verte devraient être compris dans l’échange – en d’autres termes, ceux dont l’incorporation à Israël n’affecterait pas la continuité d’un futur État palestinien. D’autres déclarent que la principale préoccupation doit être de réduire le nombre de colons qui devraient quitter leur maison. Pour cette raison, ils soutiennent l’annexion de colonies qui s’enfoncent profondément dans la Cisjordanie, comme Ariel, même si cela a pour effet de couper le nouvel État palestinien en parties séparées l’une de l’autre.
L’Initiative de Genève de 2003, démarche commune israélo-palestinienne de la société citoyenne, donne une bonne idée du terrain d’entente entre les deux parties. Selon les principes fondamentaux de cet accord, les blocs de colonies de Gush Etzion (à l’exception de Efrat), Ma’aleh Adumim (à l’exception de la zone contigue controversée connue sous le nom de E1), Modi’in Ilit et Givat Ze’ev feraient partie d’Israël. Somme toute, 2,2 % de territoire de chaque côté ferait l’objet d’un échange.
Les propositions échangées par le premier ministre d’alors, Ehud Olmert, et le Président palestinien, Mahmoud Abbas, cinq ans après, en tant que partie de la Conférence d’Annapolis, sont aussi révélatrices de où il y a un certain consensus. Olmert a proposé d’annexer tous blocs de colonies importants (environ 5,9 % du territoire de la Cisjordanie) en échange de 5,2 % du territoire israélien. Dans sa contre-proposition, Abbas a proposé de donner à Israël 1,6 % de la Cisjordanie en échange de 2 % du territoire israélien. Abbas n’était pas enclin à inclure Ma’aleh Adumim ou Givat Ze’ev dans ce 1,6 % mais a totalement accepté de le faire pour Modi’in Ilit et Gush Etzion (mais pas Efrat).
Le Palestinian Center for Policy and Survey Research (Centre Palestinien de Recherche sur la Politique et les Enquêtes), en coopération avec le Tami Steimetz Center for Peace Research (Centre Tami Steinmetz de Recherche sur la Paix) à l’Université de Tel Aviv, dirige des enquêtes périodiques pour évaluer le soutien des Palestiniens et des Israéliens aux différentes initiatives dont le but est de résoudre le conflit. Le dernier sondage, de juin 2018, a constaté que le soutien à la solution à deux États, parmi les sondés à la fois Palestiniens et Israéliens, était tombé au-dessous de la barre médiane – à exactement 43 % de chaque côté, son plus bas niveau en deux décennies. Toutefois, elle demeure l’option la plus populaire des deux côtés en comparaison aux alternatives : un État avec des droits égaux pour tous les citoyens, un État sans égalité des droits pour les Palestiniens, ou l’expulsion ou “le transfert” de la population minoritaire du grand Israël ou de Palestine.
Expliquant le déclin du soutien à la solution à deux États parmi les Palestiniens, le Dr. Khalil Shikaki, directeur du PSR, à déclaré à Haaretz : « Le facteur déterminant est le sentiment que la solution à deux États n’est plus réalisable ni faisable, et c’est-à-cause de certains sentiments au sujet des aspirations à long terme d’Israël, au sujet de la construction de colonies, au sujet du glissement vers la droite de la société israélienne, et – particulièrement au cours des deux dernières années – l’impression que l’administration des E.U. ne s’intéresse plus à la promotion de la solution à deux États, et plus récemment, que le monde arabe a globalement abandonné les Palestiniens. »
La sondeuse et analyste politique Dahlia Scheindlin, qui a collaboré à l’enquête, remarque que les Israéliens sont aussi en train de perdre l’espoir que la solution à deux États puisse jamais être mise en oeuvre. « Depuis à peu près 2010, nous constatons une baisse du soutien, et il n’y a pas de hasard que ce soit la décennie pendant laquelle Netanyahu s’est trouvé au pouvoir, » déclare-t-elle. L’enquête a constaté que la chute la plus importante du soutien à la solution à deux États parmi les Israéliens a eu lieu du côté gauche de l’éventail politique.
Selon Shikaki, pratiquement tous les Israéliens qui soutiennent une solution à deux États insistent sur le fait que le futur État palestinien soit démilitarisé, mais ce n’est pas forcément le cas parmi les Palestiniens partisans de deux États. « Il semble que la majorité pense qu’il sera démilitarisé, et, pourtant, ils continuent à en soutenir l’idée, » dit-il.
Le statut futur de Jérusalem est aussi un problème qui divise, avec de nombreux Israéliens partisans d’une solution à deux États qui ne souhaitent pas renoncer à contrôler certaines parties de la ville, comme les lieux saints. « Bien que les deux parties aient des positions très strictes au sujet de Jérusalem, je pense qu’il y a un espace pour une certaine flexibilité qui permette que Jérusalem soit divisée et serve de capitale aux deux États, » déclare Shikaki. « Bien sûr, ceux qui sont partisans d’une solution à deux États ne soutiennent pas tous cette idée, mais je pense qu’elle vaut pour la majorité des deux parties. »
La question de savoir si les réfugiés palestiniens seront autorisés à retourner en Israël est un problème encore plus épineux. Les Israéliens partisans de deux États s’opposent massivement à l’octroi aux réfugiés palestiniens d’un droit au retour illimité par crainte du fait que les Juifs pourraient par conséquent perdre la majorité. Tandis que les Palestiniens déclarent souvent que le droit au retour est une pierre d’achoppement, selon Shikaki, « la majorité de ceux qui soutiennent une solution à deux États prennent conscience du fait que la majorité écrasante des réfugiés s’établiront dans l’tat palestinien et qu’Israël n’acceptera qu’un nombre très réduit et symbolique de réfugiés. »
Ces jours-ci, Shaul Arieli, membre fondateur de l’Initiative de Genève, se considère lui-même comme faisant partie d’une rare espèce : les irréductibles partisans de la solution à deux États. Beaucoup de ceux qui ont perdu la fois en cette idée invoquent l’accroissement ces dernières années du nombre des colons et l’impossibilité de tous les évacuer. Toutefois, Arieli déclare qu’il reste toujours convaincu qu’une solution à deux États est géographiquement faisable. « En principe, 80 % des colons pourraient rester où ils sont si nous faisons un échange de 4% du territoire, » déclare-t-il . « Cela impliquerait l’évacuation de 30.000 familles, et il n’y aurait pas le moindre problème à trouver à ces familles un logement et des emplois en Israël. Après tout, nous avons accueilli plus d’un million d’immigrants venus de l’ancienne Union soviétique en l’espace de quelques années pendant les années 90 – donc, en comparaison de cela, 30.000 familles c’est un jeu d’enfants. »
Le problème, admet-il, est le manque actuel de volonté politique pour proposer une telle solution. « Il y a par ailleurs des réticences du côté palestinien, mais le principal problème vient de nous, » déclare-t-il . « Pour qu’une solution à deux États avance, quelque chose de très dramatique doit se produire – comme l’Autorité Palestinienne devant s’effondrer ou Netanyahu devant être mis à la porte. Les citoyens d’Israël doivent prendre conscience que ces ont eux qui sont responsables – s’ils veulent vraiment que la solution à deux États intervienne, c’est alors à eux qu’il incombe d’élire de nouveaux dirigeants parce qu’elle ne va pas intervenir avec les dirigeants que nous avons. »
Un État ou deux ? La confédération
L’Union Européenne est un exemple important de confédération : des États souverains qui se sont rassemblés et qui ont transféré des pouvoirs à un organisme de supervision. Dans la version israélo-palestinienne, ainsi que ses partisans l’envisagent, chaque État aurait son propre gouvernement et ses propres organes législatifs, mais les problèmes spécifiques – comme la gestion de l’eau, l’environnement et les ressources naturelles – seraient régis conjointement. Il y aurait aussi un certain degré de coopération pour des questions relevant de la sécurité et de l’économie.
Les partisans d’une confédération israélo-palestinienne conçoivent leur modèle comme une alternative améliorée et moins perturbatrice que la solution à deux États parce que dans le cadre de cette proposition, tous les habitants du territoire resteraient là où ils sont. A la tête de la campagne pour créer une confédération israélo-palestiniennne – une idée qui a bénéficié d’un énorme engouement ces dernières années, notamment parmi les Israéliens qui ont désespéré de la solution à deux États – il y a un mouvement appelé Un Pays pour Tous (connu aussi sous le nom de Deux Etats, Une Patrie). Fondé par le journaliste israélien Meron Rapoport et le militant palestinien Awni Almsni, il demande la création de deux États peu ou prou le long de la Ligne Verte de 1967, mais avec une liberté de circulation entre eux.
Dans leur conception, les Juifs et les Palestiniens peuvent s’installer dans l’un ou l’autre État, mais les Juifs habitant en Palestine auraient la citoyenneté israélienne et ne pourraient votre qu’aux élections israéliennes tandis que les Palestiniens qui habiteraient en Israël auraient la citoyenneté palestinienne et ne pourraient voter qu’aux élections palestiniennes. Les Arabes israéliens conserveraient tous leurs droits actuels en tant que citoyens. Dans le cadre de ce projet, l’État palestinien nouvellement constitué pourrait accorder la citoyenneté aux citoyens palestiniens et Israël continuerait à accorder la citoyenneté, mais un nombre limité seulement de réfugiés palestiniens seraient autorisés à retourner habiter en Israël.
« Nous ne pensons pas que la séparation totale est souhaitable ou même possible à ce stade, » déclare Oren Yiftachel, professeur de géographie à l’Université Ben-Gurion du Néguev et militant incontournable du mouvement. Parmi ses partisans il y a des Palestiniens et des Israéliens, dont des membres éminents de la communauté des colons.
Le modèle classique à deux États n’est pas une solution viable, déclare Yiftachel, parce qu’Israël maintiendrait toujours le contrôle important des frontières de l’État palestinien nouvellement constitué. « Ce que nous obtiendrions ne serait qu’un répit jusqu’au prochain cycle de combats, » déclare-t-il. « Comme Gaza, il deviendrait un État-ghetto, et cette situation ne manquera pas de créer beaucoup de tension.”
Yiftachel ne pense pas qu’un État binational soit la réponse non plus, puisqu’il exigerait à la fois des Juifs et des Palestiniens de renoncer à leurs rêves respectifs d’un foyer national. « Ils ne l’accepteraient pas, et pourquoi devraient-ils le faire, » déclare-t-il. « En fait, c’est contraire au droit international de supprimer les États existants. »
Il est convaincu que les Israéliens qui soutiennent un État binational agissent ainsi parce qu’ils pensent que la seule autre alternative est l’apartheid. « Nous pensons absolument qu’il y a un grand risque d’apartheid, mais contrairement à beaucoup des défenseurs d’un seul État, nous croyons qu’il n’est pas trop tard pour l’empêcher, » dit-il.
Thabet Abu Rass, co-directeur des Initiatives d’Abraham, une organisation qui fait la promotion d’un espace social commun en Israël, est un des premiers convertis à l’idée d’une confédération et est actif dans le mouvement. En tant qu’Israélien ayant de la parenté à Gaza, dit-il, il rejette l’idée d’une séparation telle qu’englobée dans le slogan « Nous sommes ici, et ils sont là » qui est répandu parmi de nombreux partisans de la solution à deux États.
« En tant que Palestinien citoyen d’Israël, je ne veux pas être séparé des miens à Gaza, » dit-il . « Je veux continuer à être à la fois ici et là, juste comme les Juifs de New-York, qui pensent qu’ils appartiennent à deux endroits. Pourquoi peuvent-ils avoir ce droit et pas moi ? »
Ils ne soutient pas non plus une solution à un État qui accorderait aux Palestiniens des droits égaux. « A l’heure actuelle nous ne formons que 20% de la population, et Israël nous considère comme une menace et nous tolèrent peu, » dit-il . « Quand nous formerons 50 % de la population, il y aura un État d’apartheid, et, finalement, nous aurons une guerre civile ici. »
Arieli, le défenseur de deux États, rejette l’idée de confédération en tant solution déguisée à un État. « C’est une bonne idée, mais pas très commode, » déclare-t-il . « Comment sommes-nous censés combiner les deux économies quand il y a un si énorme fossé entre elles ? Quand le revenu par tête en Israël est de près de 40.000 $ (35.500 €) et de seulement 3.000 $ (2.665 €) en Cisjordanie ? La liberté de déplacement et les frontières ouvertes est une magnifique idée, mais n’oublions pas où nous habitons.
« Les gens pour la confédération font certaines suppositions au sujet de la nature humaine qui n’ont aucun fondement dans la réalité. Que vont-ils faire, par exemple, après la première attaque terroriste ? Comme je le pense, leur idée est une recette de guerre civile, et ce qui les pousse est simplement la peur – la peur d’avoir à évacuer 100.000 colons. »
Pourtant, selon Scheindlin, le soutien actuel à la création d’une confédération se situe à environ 30 % aussi bien parmi les Israéliens que parmi les Palestiniens, et il est en hausse particulièrement parmi les Israéliens de droite et du centre. « Cela est assez surprenant, » déclare-t-elle , « étant donné que pas un seul parti n’a parlé de cette solution. »
Les solutions à un État
La solution à un État couvre un éventail d’idées tellement large qu’à la fois des Israéliens à l’extrême-droite et à l’extrême-gauche se comptent parmi ses partisans – tout comme certains Palestiniens. A un extrême il y a ceux qui sont partisans d’un État exclusivement juif ou palestinien qui nécessite l’expulsion ou le transfert de l’autre groupe, et à l’autre il y a ceux qui rêvent d’un seul État démocratique – ni juif ni palestinien – avec des droits égaux pour tous ses citoyens. Au centre il y a diverses formes d’annexion israélienne, dont certaines comprennent la citoyenneté et le droit de vote pour les Palestiniens et dont certaines non. La plupart des propositions d’annexion ont été rejetées par leurs détracteurs comme étant soit une voie vers l’apartheid soit carrément l’apartheid. Presque toutes les propositions israéliennes d’annexion ne comprennent pas la Bande de Gaza. Voici certaines des principales options en débat dans cette catégorie.
Un seul État démocratique – Cette proposition demande la création d’un État binational entre le Jourdain et la Mer Méditerranée, avec des droits entiers et égaux pour tous ses citoyens. Par définition, cela signifierait la fin de l’idée à la fois un foyer d’un foyer national juif et d’un foyer national palestinien. « Pensez aux U.S.A., » déclare Jeff Halper, membre fondateur d’un mouvement palestino-israélien relativement nouveau visant à créer un État démocratique unique dans la « Palestine historique. »
« Tout le monde sait que la solution à deux États est morte, et les gens passent à autre chose, » ajoute-t-il . « Donc si ce n’est pas deux États et pas un État d’apartheid, c’est un État. Et qu’est-ce que cela signifie ? Eh bien, vous avez retiré tous ces idées-là comme les confédérations et les fédérations, toutes les sortes d’alternatives alambiquées – la nôtre ne fait que tailler dans tous ces trucs. »
La Campagne pour Un Etat Démocratique, comme elle est appelée, est configurée pour être officiellement lancée en mai. Halper sait qu’il a pris un travail taillé à sa mesure. Jusqu’ici, seulement 140 personnes ont rejoint le mouvement, et comme on pouvait s’y attendre, la majorité écrasante de ceux-ci sont des Palestiniens. Amener des milliers de Palestiniens à adhérer ne pose pas de problème, mais nous devons entraîner, aussi, à notre suite des centaines d’Israéliens, » reconnaît Halper, militant de gauche chevronné et directeur du Comité Israélien Contre la Démolition des Maisons.
Un document qui expose les principes fondamentaux de l’initiative montre pourquoi cela pourrait être un défi. “Nous soutenons que la seule voie pour arriver à la justice et à une paix permanente, » dit-il , « est de démanteler le régime d’apartheid colonial dans la Palestine historique et de créer un nouveau système politique fondé sur l’entière égalité civique, sur une totale mise en œuvre du droit au retour des réfugiés palestiniens, et sur la construction des mécanismes nécessaires pour corriger les injustices historiques envers les Palestiniens à la suite du projet colonial sioniste. » Il va sans dire, que le nouvel État démocratique ne s’appellerait pas Israël et que les Juifs n’auraient plus le droit d’y immigrer librement, comme ils le font aujourd’hui en application de la Loi du Retour.
Selon Scheindlin, l’idée d’un État binational n’a jamais recueilli plus de 20 % de soutien parmi les Israéliens, et légèrement plus – environ un tiers – parmi les Palestiniens. « Dans les deux dernières années, cependant, nous avons constaté une légère augmentation, y compris du côté juif, » déclare-t-elle.
Les cinq versions suivantes d’une solution à un État bénéficient principalement du soutien de la droite israélienne. Aucune d’elles ne comprend Gaza, et le nouvel État créé dans toutes celles-ci s’appellerait toujours Israël. Toutes exigent des Palestiniens de renoncer à leur rêve d’un foyer national indépendant.
L’annexion de la Cisjordanie avec la citoyenneté pour les Palestiniens : Cette solution soutenue principalement par la droite israélienne, y compris par les membres du Likud, demande d’annexer toute la Cisjordanie et d’accorder la citoyenneté à tous les Palestiniens qui y habitent. Feu Moshe Arens, ancien ministre de la défense dans le gouvernement du Likud et chroniqueur de Haaretz dans ses années de retraite, était un défenseur éminent de cette version de la solution à un État. Se fondant sur les tendances démographiques actuelles, de nombreux Israéliens juifs craignent de pouvoir ne plus être majoritaires, si une telle solution était mise en oeuvre. Ses défenseurs maintiennent, toutefois, que les estimations de la population palestinienne entre le Jourdain et la Mer Méditerranée sont grossièrement exagérées et soutiennent qu’il n’y a pas de raison de craindre de perdre la majorité dans peu de temps. Ils disent aussi qu’il y a peu de raison de supposer que les Palestiniens exerceront leur droit à obtenir la citoyenneté.
L’annexion de la Cisjordanie sans la citoyenneté (ou de façon conditionnelle) pour les Palestiniens : Un projet rédigé par le Ministre adjoint des Affaires étrangères, Tzipi Hotovely du Likud, autoriserait les Palestiniens à obtenir la citoyenneté israélienne dans le cadre de cette sorte de modèle à un État, mais seulement après qu’Israël réalise avec succès un grand projet d’absorption de deux millions d’immigrants juifs venus de partout dans le monde. Cette augmentation massive de la population garantirait aux Juifs la réalisation et le maintien de leur majorité dans le Grand Israël. Hotovely soumettrait l’octroi de la citoyenneté aux Palestiniens à leur acceptation de s’enrôler dans une certaine forme de service national.
Le législateur du Likud Miki Zohar soutient une autre version de cette proposition : accorder aux Palestiniens le droit de résident et certains droits, à l’exception du droit de vote aux élections nationales. Bezalel Smotrich de Habayit Hayehudi (le Foyer Juif) – sans doute le membre le plus à droite de la Knesset sortante – a proposé d’annexer la Cisjordanie et de donner le choix aux Palestiniens entre faire allégeance à l’État juif ou partir. Dans le cadre de son projet ceux qui resteraient n’auraient pas le droit de voter aux élections israéliennes.
L’annexion partielle : Cette solution est considérée comme un compromis pour ceux qui rejettent la solution à deux États parce qu’ils craignent qu’un État palestinien indépendant ne représente pour Israël une menace militaire sur sa frontière orientale mais qui en même temps prennent conscience que l’annexion de toute la Cisjordanie représenterait une menace démographique pour l’État juif. Conçu par Naftali Bennett, un homme politique de droite qui a récemment créé un nouveau parti politique, le projet consisterait en l’annexion par Israël de la Zone C de la Cisjordanie. C’est où sont situées les colonies israéliennes et elle représente environ 60 % de l’ensemble du territoire.
Dans le cadre des accords d’Oslo, qui ont été signés dans les années 1990 avec l’objectif d’ouvrir la voie à la création d’un État palestinien indépendant, la Cisjordanie a été divisée en trois parties. Dans la Zone A, qui comprend toutes les villes palestiniennes importantes, l’Autorité Palestinienne a plus ou moins l’autonomie entière. Dans la Zone B, composée aussi de villes et de villages palestiniens, les Palestiniens conservent le contrôle sur la vie civile, mais Israël est chargé de la sécurité. Dans la Zone C, où habitent selon les estimations 300.000 Palestiniens, Israël garde le contrôle complet. Dans le cadre de la proposition de Bennett, la citoyenneté serait proposée à tous les Palestiniens habitant la Zone C. Il soutient d’accorder aux Palestiniens une certaine forme d’autonomie aux Palestiniens des zones A et B – mais pas un État indépendant. Bennett supprimerait tous les points de contrôle militaires, et les Palestiniens auraient le droit de se déplacer en Cisjordanie sans restriction, mais Israël maintiendrait le contrôle militaire sur l’ensemble du territoire. Les trois zones de la Cisjordanie ne sont pas contiguës avec , cependant, la Zone A et la Zone B situées à l’intérieur de la Zone C. Le projet de Bennett crée effectivement 165 enclaves palestiniennes séparées à l’intérieur de la Cisjordanie. Et si Israël annexait la Zone C, la frontière ne serait pas alors une ligne régulière, mais plutôt, un dédale extrêmement compliqué.
La Fédération : Pensez aux Etats-Unis, à l’Allemagne ou à la Suisse. Dans une fédération, il y a un gouvernement central, mais le pays est divisé en États, provinces ou cantons qui détiennent aussi un pouvoir considérable. Ce projet demande l’application du droit israélien à l’ensemble de la Cisjordanie et l’octroi de la pleine citoyenneté et des droits de vote à tous les Palestiniens y habitant. En divisant le pays nouvellement élargi d’une certaine façon, la population juive, toutefois, serait en mesure de maintenir sa majorité dans le système politique même si elle la perdait dans la population.
Le Mouvement pour la Fédération — co-fondé il y a cinq ans par Emanuel Shahaf, ancien haut dirigeant du Mossad, et Aryeh Hess, ancien directeur à l’Agence Juive — envisage un Israël qui soit divisé en 30 cantons. Selon ce projet, 20 de ces cantons aurait une majorité juive tandis que seulement 10 aurait une majorité palestinienne. A côté de la Knesset, une nouvelle assemblée serait instaurée, composée de représentants des cantons. Cette méthode de morcellement du pays en cantons permettrait de garantir que les Juifs continueraient à avoir l’avantage politique. Ce projet verrait la dissolution de l’Autorité Palestinienne et toutes les colonies de Cisjordanie seraient conservées. Toutes les questions de sécurité seraient supervisées par les Forces de Défense Israéliennes. Parmi les législateurs israéliens, il y a un ardent défenseur d’une telle solution, Yehudah Glick, membre du Likud, bien connu en tant que dirigeant de la campagne en vue d’autoriser les Juifs à prier sur le Mont du Temple de Jérusalem [1].
L’expulsion : Le dernier sondage commun mené par le PSR a mis en évidence que 8 % des Israéliens sont favorables à un seul État dans lequel les Palestiniens seraient expulsés ou transférés à partir de tout le territoire. Le souhait d’être débarrassé de l’autre partie était encore plus fort parmi les Palestiniens : 17 % de ceux interrogés se montraient favorables à un seul État sans Juifs.
Traduit de l’anglais par Yves Jardin, membre du GT prisonniers de l’AFPS