Des diplomates européens ont organisé lundi une démonstration collective de refus des colonies israéliennes et du déplacement forcé de Palestiniens en rendant visite à un village de Cisjordanie confronté à une démolition imminente.
Des envoyés des consulats à Jérusalem de tous les 28 pays membres de l’Union Européenne – y compris de Grande-Bretagne- sont arrivés de façon massive à Khirbet Susiya au Sud des Collines d’Hébron pour envoyer un message net à Israël de ne pas appliquer un ordre d’expulsion dont certains ont dit qu’il compromettrait la possibilité de résoudre le conflit avec les Palestiniens qui date de plusieurs décennies.
La délégation a assisté à une cérémonie mettant en évidence la condition d’environ 300 villageois confrontés au risque de devenir des sans-abri après que la Cour Suprême israélienne a confirmé un plan pour démolir leurs maisons délabrées et les obliger à se réinstaller ailleurs.
La Cour a rejeté le mois dernier le recours des villageois pour geler les propositions de démolition de leurs maisons faites par l’Administration Civile, l’organisme militaire israélien gouvernant la Cisjordanie, lequel a tiré argument du fait qu’elles ont été construites sans autorisation et du manque des infrastructures nécessaires.
Les habitants ont mis l’accent sur le fait qu’ils ont été forcés de faire des constructions illégales, parce que les permis de construire ne leur sont jamais accordés et ils accusent les autorités israéliennes de leur refuser délibérément de pouvoir disposer de services.
Ils déclarent qu’Israël veut se débarrasser du village qui se situe en Zone C, une zone officiellement sous le contrôle de l’armée israélienne en application des accords de paix d’Oslo de 1993, pour développer la colonie juive voisine de Susiya, fondée il y a plus de 30 ans.
“S’ils démolissent le village, ce sera un désastre” a déclaré Jihad Nawajah, chef du conseil du village. “Il est clair que leur principal but est d’expulser les Palestiniens et de prendre les terres pour le développement des colonies.”
La revendication est soutenue par les militants des droits de l’homme, parmi lesquels B’Tselem, une association israélienne, qui déclare qu’Israël veut expulser les Palestiniens de la région pour annexer effectivement les terres de Cisjordanie avant que ne soit conclu un accord de paix final.
Le village, selon les militants, existe depuis le 19ème siècle, mais il a été démoli deux fois, en 1986 et 2001, et reconstruit à des endroits proches.
C’est l’un des nombreux villages palestiniens de la région qui luttent depuis longtemps contre les menaces de démolition et d’expulsion, certains parce que l’armée israélienne prétend qu’ils se situent sur des champs de tir d’entraînement.
John Gatt-Rutter, le représentant de l’UE à Jérusalem, a déclaré que Khirbet Susiya est devenu un “nom symbolique pour une politique qui a privé les Palestiniens de leurs terres et de leurs ressources.”
“Notre présence ici aujourd’hui montre à quel point dans l’UE nous prenons au sérieux l’intention de démolir ce village et ses structures et d’expulser ses habitants” a-t-il déclaré. “Mais Susiya n’est pas un cas isolé. Il est difficile de ne pas établir des parallèles avec ce qui arrive ailleurs en Cisjordanie et avec les communautés bédouines.”
Alistair McPhail, consul général de Grande-Bretagne, a qualifié la politique de démolition “d’obstacle à la solution à deux Etats”, généralement définie comme Israël coexistant avec un état palestinien.
“De façon générale nous n’apportons pas notre soutien aux démolitions et nous pensons que les colonies sont illégales” a-t-il déclaré. “Nous essayons de préserver la possibilité de la solution à deux Etats, et eux ils la compromettent.”
L’inquiétude internationale au sujet de la politique de colonisation d’Israël a été davantage mise en évidence lundi quand il est apparu que la Chine avait retardé le départ de milliers de travailleurs migrants après avoir exigé qu’ils ne soient pas employés dans les colonies qui se situent sur les terres que les Palestiniens revendiquent pour un Etat futur.
Les travailleurs devaient venir en Israël pour exécuter les travaux de construction faisant partie d’un accord bilatéral antérieur entre les deux gouvernements.
Un fonctionnaire israélien a admis que les inquiétudes chinoises quant au fait que les travailleurs puissent travailler dans les colonies avaient constitué un obstacle de taille.
“Nous sommes en train de négocier avec la Chine en vue d’un accord sur l’arrivée de milliers de travailleurs supplémentaires” a déclaré le fonctionnaire à l’AFP.
“Pour le moment, les pourparlers achoppent sur d’autres problèmes, parmi lesquels l’emploi de ces immigrants dans les colonies de Judée et Samarie (le terme biblique pour la Cisjordanie). Pékin exige que nous l’assurions qu’il n’y aurait pas de travailleurs dans cette région.”
Traduit de l’anglais par Y. Jardin, membre du GT de l’AFPS sur les prisonniers