Un militant israélien, âgé de 80 ans, a déclaré qu’« il avait eu peur pour sa vie », mercredi, quand un groupe de jeunes colons masqués, armés de pieds-de-biche, ont donné l’assaut contre lui et contre un groupe en grande partie formé de volontaires étrangers apportant leur aide aux cultivateurs palestiniens dans le Nord de la Cisjordanie lors de la récolte annuelle des olives.
Le rabbin Moshe Yehudi a fait les remarques suivantes à la Radio de l’Armée quelques heures après que lui et ses amis bénévoles aient subi une attaque brutale attestée par des groupes de défense des droits présents sur les lieux.
Sur les cinq volontaires qui ont été blessés, quatre venaient des Etats-Unis, du Royaume-Uni et d’autres pays européens, a déclaré un chercheur de terrain travaillant pour l’ONG Yesh Din [1]. Yehudai, un militant israélien de Rabbins pour les Droits de l’Homme [2], était la cinquième personne visée, ayant reçu des coups au bras et à la tête. Il a été évacué avec un bras cassé au Centre Médical Meir à Kfar Saba.
Les Rabbins pour les Droits de l’Homme recherchent des volontaires israéliens et étrangers pour accompagner les Palestiniens, qui, disent-ils, font face dans toute la Cisjordanie à des menaces et des violences, lorsqu’ils qu’ils s’occupent de leurs cultures situées à proximité des colonies.
Mercredi matin, environ dix volontaires portaient assistance aux cultivateurs palestiniens des villages de Burin et Haware quand un groupe de plus de 30 colons masqués sont descendus de Yitzhak, une colonie répertoriée par les services de sécurité israéliens comme un foyer d’extrémisme, selon un chercheur de terrain de Yesh Din.
Le chercheur de terrain de Yesh Din qui a parlé au Times of Israel a déclaré qu’il était arrivé sur les lieux peu de temps après le début de l’attaque. Après qu’une jeep des FDI (Forces de défenses israéliennes) se soit montrée dans le lointain, en train de faire route vers le terrain, les jeunes colons ont allumé un feu de broussailles et ont fait retraite vers Yitzhar. A ce moment-là, le véhicule militaire a rebroussé chemin, a déclaré le membre de l’ONG.
Des avions de lutte contre l’incendie ont été dépêchés sur les lieux pour éteindre l’incendie qui a détruit par le feu des centaines d’oliviers, dont certains vieux de plusieurs décennies, selon Yesh Din.
Une porte-parole des FDI a dit qu’elle faisait une enquête sur l’incident, mais s’est révélée incapable de fournir tout renseignement supplémentaire.
Les volontaires étrangers ont déposé une déclaration au commissariat de police voisin dans la colonie d’Ariel, mais une porte-parole des forces de l’ordre n’a pas été capable de fournir des précisions quant à l’ouverture éventuelle d’une enquête.
Un communiqué émanant mercredi dernier de la colonie de Yitzhak a rejeté la responsabilité de l’incident sur « les provocations dues aux militants d’extrême-gauche » qui de concert avec les Palestiniens s’étaient approchés de la colonie, ce qui, dit le communiqué, a créé « un danger pour la sécurité. »
Parlant de l’ambulance du Croissant Rouge Palestinien qui soignait ses blessures près des lieux de l’attaque, Yehudi a rappelé qu’il apportait son aide aux cultivateurs palestiniens avec d’autres volontaires quand les colons leur ont donné l’assaut.
« Tout d’un coup, les colons sont arrivés, le visage (voilé). Ils ont commencé à courir vers nous, ils m’ont encerclé, ont jeté des pierres sur moi, m’ont frappé avec des pieds-de-biche, me causant une plaie à la tête » a-t-il déclaré.
« Je leur ai dit que j’avais 80 ans. Laissez-moi tranquille » a-t-il ajouté, en déplorant que les assaillants aient refusé de le faire.
L’incident est intervenu alors que la récolte annuelle des olives venait juste de commencer. Plus de 100.000 familles palestiniennes dépendent dans une certaine mesure du revenu qu’ils tirent de leurs olives et quelque 18 % de la production agricole palestinienne vient des olives selon les statistiques du Bureau des Nations Unies de Coordination des Affaires Humanitaires (United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs).
La récolte est une occasion fréquente d’affrontements entre Palestiniens et colons israéliens, ce que les Forces de défense israéliennes déclarent chercher à empêcher.
Les médias palestiniens et les associations de défense des droits ont rapporté de nombreux cas d’Israéliens faisant obstacle aux récoltes annuelles, en attaquant les Palestiniens, en volant les olives, et en déracinant les arbres.
Dans de nombreux endroits, les cultivateurs disent qu’ils sont confrontés aux menaces et aux violences de la part de colons extrémistes voisins et appellent à l’aide pour les soutenir à la fois des étrangers et des Israéliens, parmi lesquels des rabbins juifs, pour les protéger eux et leurs récoltes.
Certains des incidents sont perçus comme des tentatives de revanche après des agressions palestiniennes contre des Israéliens, même si les cultivateurs visés n’étaient pas impliqués.
Dans d’autres cas, les associations de défense des droits déclarent, qu’il n’y a pas d’autre raison que de détruire les biens des Palestiniens.
Les colons israéliens se plaignent de ce que leurs récoltes aient aussi été endommagées par les Palestiniens, en incluant un incident de mai 2018 quand environ 1.000 ceps de vigne ont été détruits.
Actes criminels haineux
Parmis les derniers crimes haineux visant des Palestiniens et s’étant déroulé au delà de la ligne verte, mercredi matin, des habitants du village de Deir Ammar au centre de la Cisjordanie, ont trouvé à leur réveil dix de leurs véhicules vandalisés et des tags à la peinture sur les murs avec des slogans en hébreu.
Les phrases barbouillées sur les voitures et sur les murs incluaient : « Quand nos frères sont assassinés, il est de notre devoir de ne pas oublier » et « La nation d’Israël vit », selon un travailleur de terrain de Yesh Din qui est arrivé sur les lieux et a fourni des photos des dommages.
La police a déclaré qu’elle était au courant de l’incident et qu’elle enquêtait sur le sujet.
La semaine dernière, les forces de l’ordre ont ouvert une enquête après que des Palestiniens du village de Qira dans le Nord de la Cisjordanie aient trouvé à leur réveil 13 véhicules vandalisés et des messages de haine en hébreu tagués sur les murs partout dans la bourgade.
Parmi les phrases peintes à la bombe dans la bourgade au Nord de la colonie d’Ariel il y avait « Il n’y a pas de place en Israël pour des ennemis » et « Quand des Juifs sont blessés, il est de notre devoir de ne pas oublier. »
Les enregistrements à partir des caméras de surveillance ont pris des images de plusieurs individus masqués marchant dans le village et crevant sur leur chemin les pneus d’un tracteur et d’autres véhicules.
Abdullah Kamil, le Gouverneur du District de Salfit dans lequel se situe Qira, a déclaré à Haaretz que le gouvernement israélien « porte la responsabilité des actes criminels et des attaques répétées perpétrées par les colons. »
Malgré les dizaines d’actes criminels haineux, durant l’année passée, visant les Palestiniens et leur biens, peu de leurs auteurs ont déjà été arrêtés et inculpés, selon les associations de défense des droits.
Les incidents, souvent mentionnés comme des attaques marquant le prix à payer, se limitent habituellement à des incendies et à des graffitis, mais ont parfois pris la forme d’attaques physiques et même de meurtres.
En décembre, le Bureau des Nations Unies pour la Coordination des Affaires Humanitaires a publié un rapport qui a montré un accroissement en 2018 de 69 % des attaques des colons contre les Palestiniens en comparaison à 2017.
Traduit de l’anglais par Yves Jardin.