Pour la deuxième fois je suis allé au
Liban dans le cadre d’un voyage
collectif [1]. Le samedi 19 mai au
matin, nous partons vers le camp de Rachidiyeh
avec lequel est jumelée la ville de
Douarnenez. Nous sommes trois personnes
venues de cette ville. La charte de jumelage
a été signée lors d’un précédent voyage
en novembre 2005, puis confirmée par un
vote du conseil municipal. En mai 2006,
nous avions accueilli une équipe d’enfants
du camp, venus participer à un tournoi international
de football qui, chaque année, permet
à des équipes de plusieurs dizaines de
pays de se rencontrer. Les jeunes, logés
dans des familles, ont été chaleureusement
accueillis. Nous sommes reçus au camp par
Sultan Aboul Aynaïn, responsable du camp,
ainsi que du Fatah pour le Liban, qui se félicite
de ces échanges et invite à revenir
chaque année. Déjà, en ce mois de mai, il
dit craindre de graves problèmes au Liban,
avec une épreuve de force dans laquelle les
Palestiniens seraient entraînés. Une partie
des cartables sont remis pour les enfants,
et nous laissons médicaments et livres collectés
dans les écoles de Douarnenez. Nous
essayons d’apporter une aide concrète, qui
ne saurait se confondre avec un travail humanitaire
seulement ; l’essentiel, pour nous,
est de faire connaître à Douarnenez (et
ailleurs, par le biais d’autres jumelages) le
sort des réfugiés palestiniens, leur histoire
et d’affirmer leur droit au retour.
Nous reprenons la route vers Beyrouth.
Jusqu’au-delà de Saïda, en remontant vers
le nord, le car doit sans arrêt quitter l’autoroute,
en raison de la destruction de tous les
ponts par les bombardements israéliens
l’été dernier. Nous devons prendre les bretelles
de sortie et d’accès pour contourner
les destructions. A chaque pont il y a un chantier
et la reconstruction progresse à grands
pas. Le long de l’autoroute, des affiches
signalent le danger représenté par les bombes
(notamment à sous-munitions) qui n’ont
pas explosé. Les affiches avec la photo de
Nasrallah, leader du Hezbollah, et de Michel
Aoun, leader du Courant patriotique libre,
laisseront la place au-delà de Saïda à celles
portant l’image de Rafiq Hariri, Premier
ministre assassiné en février 2005, et parfois
de son fils Saad, leader du Courant du
Futur, allié de Walid Joumblatt au sein de
l’Alliance du 14 mars et aussi allié de Samir
Geagea, (en l’occurrence ancien dirigeant
des Forces Libanaises ayant perpétré les
massacres de Chabra et Chatila en 1982).
A Beyrouth, les tentes dressées en face du
Grand Sérail par ceux qui demandent la
démission du gouvernement Siniora sont toujours
en place, même s’il n’y a à ce moment
presque personne autour.
Nous avons auparavant visité le camp de
Chatila, jumelé avec Bagnolet. La ville a
fait un travail important pour en améliorer
les installations électriques et a accueilli
des jeunes du camp. Nous sommes reçus
au camp de Bourj el-Brajneh, aux portes de
Beyrouth, jumelé avec Avion et où sont
aussi remis des cartables. Au siège du parti
communiste libanais qui reçoit la délégation,
les responsables rencontrés affirment
pour leur part leur solidarité avec les Palestiniens.
Leur discours politique porte sur
une dénonciation de l’absence de volonté
du gouvernement pour défendre le pays,
ils s’élèvent contre les projets américains
dans la région, affirment leur opposition à
un gouvernement établi sur des bases confessionnelles
en considérant que l’opposition
fondée sur ces mêmes bases ne peut offrir
d’alternative. Ils disent souhaiter la promulgation
d’une loi électorale à la proportionnelle
dans le cadre d’une circonscription
unique non confessionnelle. Ils appellent
à une collaboration entre les peuples libanais,
palestinien et français. Dans le sud
où nous repartons le dimanche 20 mai, un
responsable du Hezbollah pour le Sud-
Liban affirmera pour sa part la solidarité de
son parti avec les Palestiniens et entend
souligner que c’est un ministre du Hezbollah
qui a promulgué il y a deux ans un
décret, très mal appliqué, ouvrant un certain
nombre de professions aux Palestiniens.
Dans la journée nous passons dans
le village de Cana. Là, deux cimetières rassemblent
l’un les 102 victimes du bombardement
israélien d’avril 1996, l’autre
les 28 morts (dont 16 enfants) du bombardement
du 30 juillet 2006, qui n’a jamais
fait l’objet d’une commission d’enquête.
Le lundi 21, tout le groupe devait être reçu
à l’ambassade de France et les Douarnenistes
devaient se rendre à Rachidiyeh jusqu’au
23 pour y définir les projets à mener dans
le cadre du jumelage. Mais les évènements
en ont décidé autrement. Depuis la veille,
des combats avaient lieu au camp de Nahr
el Bared entre l’armée libanaise et le groupe
Fatah el Islam -lequel n’a rien de palestinien.
Les réceptions sont annulées et l’ambassadeur
incite les membres de la délégation
à rentrer en France. Nous partons dans
l’après-midi mais les cinq représentants de
Mitry-Mory sont bloqués à Nahr el Bared
sous les tirs ; ils n’en sortiront que le mardi.
Nous ne laisserons pas tomber Rachidiyeh.