Ils voulaient arrêter l’auteur d’un attentat au couteau, le cousin de celui-ci a été tué dans des circonstances mal définies lors de l’opération.
Des agents israéliens déguisés en civils et prétendant accompagner une femme enceinte ont mené un spectaculaire raid jeudi qui a coûté la vie à un Palestinien dans un hôpital d’Hébron, en Cisjordanie, selon des vidéos de l’établissement et des responsables.
Le Palestinien a été tué dans des circonstances obscures alors que les forces israéliennes venaient arrêter un de ses proches soigné dans cet hôpital. Le proche en question était recherché comme l’auteur d’un attentat au couteau contre un Israélien. Il s’agit d’Azzam Shalaldeh, 20 ans, qui avait grièvement blessé un Israélien près de la colonie de Mezad, au nord-est de Hébron, selon le service de sécurité intérieure.
Une vingtaine d’hommes
Des images de la vidéosurveillance de l’hôpital montrent un petit groupe d’hommes et de femmes entrant dans l’établissement et poussant ce qui semble être une femme enceinte dans un fauteuil roulant. Une vingtaine d’hommes en civil entrent immédiatement après, passant devant un écriteau indiquant "Cet hôpital est sous vidéosurveillance".
Quelques instants après, sur les images d’une autre caméra dans un couloir contigu, les mêmes hommes en blouson, dissimulés sous le keffieh palestinien, des capuches, des casquettes ou des bonnets ont sorti des armes de poing et des fusils qu’ils braquent devant eux en progressant. Parmi eux, la femme enceinte, peut-être un homme déguisé et visiblement membre de l’équipe, hâte le pas dans la même direction. Ils paraissent se diriger vers la chambre où se trouve celui qu’ils recherchent.
L’oeuvre des "moustaaribine"
La première caméra les montre, huit minutes plus tard, ressortant de l’hôpital et poussant dans la même chaise roulante, non plus la femme enceinte mais celui qu’ils ont semble-t-il arrêté. On ignore ce qu’il s’est passé entre-temps. Mais c’est dans cet intervalle qu’Abdallah Azzam Shalaldeh, 27 ans, cousin du suspect, aurait été tué.
Il a été tué par des "moustaaribine", des agents infiltrés des forces de sécurité israéliennes, détestés des Palestiniens, a indiqué le ministère palestinien de la Santé. Ces agents, qui relèvent de l’armée, de la police ou de la sécurité intérieure (Shin Beth), sont spécialistes des opérations clandestines.
Des versions divergentes
Sur les lieux, "ils ont interdit au personnel médical de bouger, ont pris le contrôle du département de chirurgie, sont allés dans la chambre de Azzam Shalaldeh (le suspect arrêté) et ont empêché quiconque de rentrer", a relaté le directeur de l’hôpital, Jihad Shawar, auprès de l’AFP. "Quand ils sont partis, l’homme (le cousin) a été retrouvé couvert de sang. Ils ont essayé de le sauver mais il est mort", a-t-il ajouté. Le Shin Beth et l’armée ont expliqué que les forces israéliennes avaient ouvert le feu quand un proche du suspect a tenté de s’opposer à son arrestation et les a attaquées.
Bilal Shalaldeh, le frère du suspect Azzam et cousin du disparu Abdallah, a contesté la version israélienne. Il était dans la chambre quand les faits se sont produits, a-t-il dit à l’AFP. "Vers 3h du matin, des moustaaribine en civil sont entrés armés dans la chambre, ils ont arrêté mon frère et m’ont attaché. Mon cousin était dans la salle de bains. Quand il a ouvert la porte, sans aucun mot ou avertissement, ils lui ont tiré dessus cinq fois", a-t-il relaté. Les agents israéliens ont empêché le personnel médical de lui porter secours jusqu’à ce qu’ils quittent la chambre, selon lui.
Colère d’Amnesty International
Pour Amnesty International, "l’assassinat d’un Palestinien de 28 ans par des forces israéliennes durant un raid dans l’hôpital al-Ahli à Hébron jeudi matin pourrait être une exécution extrajudiciaire". Se basant sur des témoignages, l’ONG remet en question la version israélienne et demande à Israël "de cesser immédiatement l’utilisation de la force contre des personnes ne représentant pas de danger immédiat", selon un communiqué d’Amnesty.