L’ombre de Mohammed Dahlan plane de nouveau sur Gaza. Son nom est sur toutes les lèvres et son argent dans tous les esprits. L’ancien chef du contre-terrorisme palestinien, âgé de 56 ans, banni de ce territoire depuis que le Hamas en a expulsé les forces du Fatah, en 2007, est l’un des principaux acteurs d’un grand jeu géopolitique. Une partie d’échecs palestino-égypto-émiratie, qui vise à reprendre aux islamistes, laminés par dix années de blocus et trois guerres contre Israël, la direction de la bande côtière palestinienne.
C’est Dahlan lui-même qui a lancé ces grandes manœuvres au début de l’été. Avec l’appui financier des Emirats arabes unis, l’ex-homme fort de Gaza, qui coule un exil doré à Abou Dhabi, s’est mis à arroser d’argent liquide l’enclave palestinienne. Fort du soutien du Caire, le proscrit promettait même un allégement de l’embargo, à travers la réouverture du terminal de Rafah, aux portes du Sinaï égyptien. En échange, il était question que l’ambitieux colonel revienne sur sa terre natale et prenne les commandes des affaires civiles, les islamistes se contentant de gérer la sécurité.
La perspective d’un retour sur la scène politique locale de son ennemi intime, qu’il accusait, en 2011, d’avoir voulu le renverser, a incité le président palestinien, Mahmoud Abbas, à passer à l’action. Le 2 octobre, son premier ministre, Rami Hamdallah, s’est rendu à Gaza et a annoncé que le gouvernement qu’il dirige depuis Ramallah prenait la relève de l’exécutif du Hamas. Une initiative encouragée par les islamistes, qui jouent de la rivalité entre les deux adversaires au sein du Fatah, pour se redonner un peu d’air.
La spectaculaire ascension du renégat du Fatah
Dahlan, doublé par Abbas, a donc perdu la première manche. Mais la route de la réconciliation interpalestinienne, semée de chausse-trappes, est encore longue. Et nul doute qu’« Abou Fadi », comme on surnomme Mohammed Dahlan dans les cercles du Fatah, n’a pas dit son dernier mot. Car depuis qu’il est persona non grata en Palestine, l’homme s’est fait beaucoup d’amis, très haut placés dans la région.