Les réunions bi-hebdomadaires
entre le président palestinien
Mahmoud Abbas et le Premier
ministre israélien Ehud Olmert reçoivent
un accueil mitigé de la part à la fois
des Palestiniens et des Israéliens.
Côté palestinien, on peut répartir la plupart
des critiques en deux catégories.
L’une des réactions est qu’une fois de plus
une direction palestinienne fait miroiter
un espoir qui ne repose que sur la bonne
volonté d’Israël et des Etats-Unis, deux
pays qui n’ont jamais été réceptifs aux
droits légitimes des Palestiniens ou simplement
à ces droits palestiniens que
garantit la légalité internationale.
La deuxième est que le « processus » est
totalement déconnecté de la réalité que
le peuple palestinien vit sur le terrain.
En d’autres termes, il n’y a aucun lien
entre l’atmosphère relativement positive
et optimiste qui entoure ces réunions et
la politique et les pratiques réelles d’Israël
qui continue à renforcer l’occupation et
à rendre la vie plus difficile tout en maintenant
toujours aussi lointain l’objectif
de la fin de l’occupation.
La reprise des relations bilatérales au
plus haut niveau politique marque une rupture
avec la catastrophique
stratégie unilatérale
d’Israël et c’est
un pas dans la bonne
direction. Cependant il
faut noter la nature schizophrénique
de la position
israélienne envers
les Palestiniens actuellement.
D’un côté,
Olmert est entré dans
des relations bilatérales
qui semblent se déplacer,
même si c’est lent, des difficultés
physiques et pratiques des Palestiniens -points de contrôle, prisonniers etc.- vers des questions politiques plus générales.
Mais au niveau pratique, nous
continuons à constater des pratiques unilatérales
sur des questions générales et
stratégiques, des colonies qui n’en finissent
pas de s’étendre et du mur, en passant
par la séparation toujours plus grande
entre Gaza et la Cisjordanie, jusqu’à la
poursuite de la fragmentation de la Cisjordanie
par un système de contrôle basé
sur les points de contrôle.
Pour Ehud Barak, pas de
retrait avant plusieurs années
Il n’y a pas que du côté palestinien que
les réunions bi-hebdomadaires -qui semblent
évoluer vers une forme de processus
politique- sont bien loin de la réalité.
Côté israélien aussi il existe une
déconnection évidente entre la réalité
politique et ces réunions. Le tout dernier exemple, la semaine dernière, en
est la déclaration du ministre de la
« Défense » Ehud Barak, lequel a affirmé
qu’il ne serait pas possible d’envisager
une forme quelconque de retrait avant plusieurs
années. Cette déclaration s’inscrit
en faux contre l’image qu’Olmert
voudrait produire pour ces réunions.
Il y a aussi un fantôme dans la machine.
Tout ce qui sortirait de ces réunions et
qui serait opposé au Hamas est voué à
l’échec. Non seulement le Hamas contrôle
directement la bande de Gaza, mais il
jouit aussi du soutien d’une majorité de
l’opinion publique palestinienne, comme
l’ont montré les élections de 2006.
Les réunions bi-hebdomadaires doivent
prendre en compte les réalités politiques.
Et même s’ils marquent en soi une avancée,
il faudrait qu’elles s’accompagnent
de débats publics constructifs. Le fait
que les aspects politiques
de ces réunions
ne sont jamais rendus
publics et qu’ils ne sont
fondés sur aucun
niveau de consultation
mesurable au niveau
de la direction ne fera
qu’affaiblir la partie
palestinienne, la rendre
vulnérable et dépendante,
tout comme elle
l’était pendant les consultations secrètes
non consultatives d’Oslo.
A vrai dire, le secret qui entoure les
aspects politiques de ces discussions,
ajouté à l’absence d’une tierce partie,
va encore isoler le côté palestinien des
sources de sa force que sont la légalité
internationale et le soutien de l’opinion
palestinienne.
Israël a su en tirer le plus grand parti à
Oslo et cela a mené directement à la
situation dont les deux parties souffrent
aujourd’hui. La partie palestinienne, à
défaut des Israéliens, aurait dû savoir
en tirer des leçons.
Ghassan Khatib est co-éditeur du
groupe bitterlemons de publications internet.
Il est vice-président de l’université
Birzeit et ancien ministre du Plan de l’ANP.