Avant de devenir un interlocuteur des Israéliens à la suite des accords d’Oslo de 1993, Yasser Arafat a été l’un des hommes les plus traqués par les services secrets israéliens. Grâce à plusieurs facteurs dont la chance, le futur leader de l’Autorité palestinienne a échappé à de nombreuses tentatives d’assassinat par les services de l’Etat hébreu. Le New York Times narre dans le détail les plans des services israéliens pour abattre le leader de l’organisation de libération de la Palestine (OLP). Ces scénarios des autorités israéliennes impliquaient des avions de ligne commerciaux ou encore l’explosion d’une bombe dans un stade entier de Beyrouth. Israël n’est finalement jamais allé au bout de ces plans. Yasser Arafat est mort le 11 novembre 2004 à Paris. Apres son décès, certains experts ont soupçonné un empoisonnement au polonium mais la thèse n’a jamais pu être prouvée.
L’erreur presque fatale d’Athènes
L’histoire se déroule le 23 octobre 1982, quelques semaines après la fin de la guerre du Liban. Une unité du Mossad, les services extérieurs israéliens, pense savoir que le leader de l’OLP se trouve à Athènes. Deux sources à l’intérieur de l’OLP leur ont en effet affirmé que Yasser Arafat doit prendre un avion privé le lendemain pour se rendre au Caire. A 14h, un des agents du Mossad confirme qu’il s’agit bien de Yasser Arafat : "Il est là. L’identification est positive".
Le chef de l’armée de l’air David Ivry a toutefois des doutes. "Je ne comprenais pas pourquoi Arafat aurait voulu aller au Caire. Selon nos renseignements, il n’avait rien à y faire là bas. Et s’il y allait, pourquoi avec ce moyen de transport [Un DHC-5 Buffalo] qui n’était pas adapté pour un homme de son statut. J’ai demandé au Mossad de revérifier si c’était la bonne personne". Le Mossad confirme à nouveau l’information. Mais le chef de l’armée de l’air n’y croit toujours pas. Finalement, à 16h55, 25 minutes après le décollage d’un jet F15 prêt à abattre l’avion, le Mossad indique que d’autres sources ne pensent pas qu’Arafat puisse être en Grèce. En effet, il s’agissait de Fathi, le petit frère de Yasser Arafat. Fondateur de la Croix-Rouge palestinienne, Fathi Arafat se trouve dans l’avion avec 30 enfants blessés palestiniens, survivants du massacre de Sabra et Chatila, perpétré par les milices chrétiennes phalangistes. Il les emmenait au Caire pour être soignés.
Un officier de l’armée à Begin : "Tu ne peux pas tuer un stade entier"
Un peu plus tôt dans l’année, le ministre de la Défense de l’époque, Ariel Sharon avait également autorisé une opération qui aurait pu être extrêmement meurtrière. L’idée était d’installer une bombe sous l’estrade en construction du stade de Beyrouth où l’OLP devait fêter le 1er janvier 1982 l’anniversaire de sa première opération contre Israël. Puis de faire exploser trois véhicules piégés une minute après la première bombe. L’ensemble du leadership palestinien aurait été éradiqué. Les explosifs avaient déjà été installés dans le stade quand au dernier moment à cause de la pression d’officiers de l’armée et du vice-ministre de la Défense, l’opération a été annulée par le Premier ministre israélien, Menahem Begin. "Tu ne peux pas tuer un stade entier. Le monde sera après nous", avait lancé un officier à Begin pour le convaincre.
Israël était-il prêt à abattre un avion de ligne commercial ?
Même après le désastre d’Athènes, Ariel Sharon ne renonce pas à tuer Yasser Arafat, y compris en utilisant la voie aérienne. Fin 1982, le Mossad apprends que le chef de l’OLP se déplace de plus en plus souvent en utilisant des avions de ligne commerciaux. Selon le New York Times, le ministre de la Défense Ariel Sharon indique alors que ces avions sont des cibles légitimes. L’idée était d’abattre l’avion loin de la côte afin que les enquêteurs prennent beaucoup de temps pour trouver la carcasse de l’appareil et déterminer si l’avion a été abattu par un missile ou a eu un incident technique.
L’armée de l’air avait même trouvé l’endroit parfait en Méditerranée pour exécuter le plan : loin de l’espace aérien israélien, sans radar en continu et avec une mer très profonde. Sous l’ordre direct d’Ariel Sharon, une surveillance d’Arafat est alors maintenue en continu. Quatre F-16 et F-15 sont placés en alerte. En 9 semaines, ces appareils décolleront 5 fois pour intercepter Arafat avant d’être rappelés au tout dernier moment. A chaque fois ce sont les officiers de l’armée qui étaient opposés à l’opération et qui ont tout fait pour la faire échouer. Amos Gilboa, ancien brigadier chef de l’armée raconte : "J’ai dit au chef de l’armée que l’Etat pourrait être internationalement décrédibilisé si cela venait à se savoir". Finalement l’opération n’a jamais eu lieu.