Cet accord, qui survient trois mois après le départ d’Hosni Moubarak (ceci expliquant en partie cela), doit théoriquement permettre une réunification sans laquelle serait impossible l’Etat palestinien que nombreux appellent de leurs voeux. Il marque l’échec de la stratégie occidentale (et en partie israélienne) dite ”Cisjordanie d’abord”.
Il s’agissait de montrer aux Palestiniens qu’ils avaient plus à gagner avec le Fatah qu’avec le Hamas. Les efforts de deux présidents américains, George Bush puis Barack Obama, appuyés financièrement par les Européens et quelques autres, s’étaient concentrés sur cet objectif avec les meilleurs cartes possibles incarnées par le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, et son premier ministre Salam Fayyad, à savoir deux hommes ayant renoncé depuis belle lurette à la lutte armée et capables de gérer efficacement l’embryon d’Etat qu’est l’Autorité palestinienne. Sans pourtant la moindre percée diplomatique.
L’option “Cisjordanie d’abord” s’est brisée net en septembre 2010 sur la question de l’arrêt de la colonisation israélienne, précondition inacceptable pour le gouvernement de Benyamin Nétanyahou, mesure de bon sens pour qui envisagerait réellement l’évacuation de la majorité de ce territoire palestinien occupé, selon les Palestiniens.
Faute d’un processus politique avec Israël, M. Abbas s’est tourné vers l’objectif de la reconnaissance de la Palestine par le plus grand nombre d’Etat possible cet automne, pour prendre au mot le président américain qui avait souhaité en septembre 2010 voir naître la Palestine un an plus tard. Cet objectif symbolique, qui ne changera rien sur le terrain dans l’immédiat mais qui placera un peu plus Israël sur la défensive, présentait un risque tant que les deux principales parties de cet éventuel Etat restaient divisées.
Les deux camps ont tout à gagner de cet accord, du moins à court terme : M. Abbas redevient le président de tous les Palestiniens (même si son mandat a expiré depuis longtemps) et le Hamas sort de l’isolement à Gaza puisque l’Egypte a réaffirmé dimanche sa volonté de rouvrir la frontière avec l’étroite bande de terre (qui ne vaut que pour les personnes et non pour l’importation de marchandises).
Pour Israël, c’est la fin d’une période propice à l’immobilisme. Pour les parrains occidentaux, le moment est venu de trancher : un gouvernement d’union national, avec le Hamas est-il une bonne ou une mauvaise chose pour la paix ? Israël a fait valoir son point de vue [1] en reprenant la piraterie fiscale qui consiste à geler le produit des taxes qu’il perçoit au profit (théoriquement) des Palestiniens qui ne disposent pas de ports ou d’aéroports pour importer les produits dont ils ont besoin. Longtemps, les Américains et les Européens se sont retranchés derrière les trois conditions avancées par le Quartet (Etats-Unis, Union européenne, Russie et Nations unies) pour établir un dialogue avec le Hamas : respect des accords passés, renonciation à la violence, reconnaissance d’Israël.
Pour le Fatah, ces trois conditions adoptées dans la précipitation après la victoire du Hamas aux élections de janvier 2006, permettaient de prendre une revanche politique en maintenant son rival dans l’isolement. Mais que faire à présent de cet endiguement si M. Abbas lui-même conclut un accord avec le Hamas ?