Ibrahim Abou Thouraïa est mort, et Gaza célèbre son nom. Sans le savoir, un soldat israélien a exaucé son vœu. Ce Palestinien de 29 ans rêvait depuis longtemps de mourir en martyr. De donner sa vie pour la cause palestinienne. Vendredi 15 décembre, il se trouvait une nouvelle fois en première ligne, à l’est de Shejaia, parmi des dizaines de jeunes venant défier les soldats israéliens, de l’autre côté de la clôture de sécurité. Une balle l’a atteint à la tête.
Après sa mort, il a suffi de quelques heures pour qu’Ibrahim Abou Thouraïa devienne une icône sur les réseaux sociaux, avec sa casquette et sa barbe noire drue. Montages photos, vidéos, dessins… Samedi, des milliers de personnes ont participé à ses funérailles. Ismaïl Haniyeh, le chef du bureau politique du Hamas, était l’un de ceux qui portaient le linceul. Les factions rivalisent d’ardeur pour revendiquer sa mémoire, alors qu’il n’avait jamais été encarté.
Pourquoi lui, et pas les trois autres victimes palestiniennes, tombées ce jour-là ? Parce qu’Ibrahim Abou Thouraïa était handicapé. Ses jambes étaient amputées au-dessus des genoux. Il ne représentait aucun danger. Il se déplaçait en chaise roulante. Dans la zone tampon accidentée près de la clôture, il avançait sur ses mains. Contre tout instinct d’auto-préservation, vendredi, il voulait jeter des pierres vers les soldats, le drapeau palestinien à la main.
L’armée a expliqué dimanche soir qu’une enquête interne était ouverte au sujet du « paraplégique », terme inadéquat pour sa condition. « L’utilisation de balles réelles est requise uniquement lorsque les forces identifient une menace significative pour la vie des soldats ou pour les systèmes de sécurité essentiels », est-il précisé.
Accidentés de la vie
Ibrahim Abou Thouraïa voulait périr dignement. « Vendredi matin, il nous a dit qu’il ne reviendrait pas, dit son frère Mohammed, 19 ans. Il a expliqué qu’il se sacrifierait pour Jérusalem...