Les éclopés, les miséreux, les curieux, les gosses qui font les fiers à bras, les anciens plus sages et les femmes en foulard, les charrettes de snacks, les journalistes sanglés dans leurs gilets de protection : samedi 30 mars, tous les acteurs de la « marche du retour » se sont à nouveau déployés le long de la frontière, en face des troupes israéliennes massivement mobilisées. A Gaza, tout se mesure selon une échelle anormale. Quatre manifestants, dont trois mineurs, ont été tués lors de ce premier anniversaire de la « marche », et 63 autres blessés par balles, mais c’est le soulagement qui domine.
D’abord en raison de la faiblesse relative de ce bilan, en comparaison des journées les plus sanglantes de ce mouvement populaire, qui a fait à ce jour 199 morts et 7 100 blessés par balles. Ensuite, en raison de l’atmosphère électrique qui a précédé, des discours alarmistes israéliens, des mouvements de troupes à la frontière. Mais à Gaza, le soulagement a une durée de vie aussi limitée que l’espoir. Dans la nuit, cinq roquettes ont été tirées en provenance de Khan Younès, sans causer de dégâts. Les tanks israéliens ont répliqué en visant plusieurs postes du Hamas. Déjà, les acteurs se concentrent sur la semaine à venir, décisive sur un plan diplomatique et humanitaire, qui doit permettre au médiateur égyptien d’arracher un résultat concret, au bord du vide et à l’approche des élections législatives du 9 avril en Israël.
Des dizaines de milliers de Palestiniens – 40 000 selon l’armée, qui minimise toujours la mobilisation – ont bravé la pluie et le vent mauvais pour affluer vers les cinq points de rendez-vous habituels. De part et d’autre, des consignes avaient clairement été données et respectées. A l’arrivée au point de Malaka, à l’est de Gaza-ville, des policiers du Hamas étaient déployés pour empêcher notamment tout acheminement de pneus à brûler. Il s’agissait de l’une des exigences israéliennes. Aucun camion transportant des dizaines de pneus n’a été prévu, contrairement à ce qui était organisé en 2018, lors des journées les plus intenses de la « marche ».